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Insee Première · Février 2024 · n° 1983
Insee Première9 % des personnes en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail en 2021

Émilie Pénicaud, Nathan Rémila (Insee)

En 2021, 9,1 % des personnes en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel, le sexisme étant le principal motif. Cette situation est plus répandue parmi les personnes déclarant un mauvais état de santé (23,4 %) et parmi les femmes (11,3 %). Ces dernières indiquent dans 30 % des cas que c’est dû à leur sexe.

La proportion des immigrés en emploi qui disent avoir été confrontés à des traitements inégalitaires ou à des discriminations (9,5 %) n’est pas très différente de la moyenne, mais 57 % d’entre eux citent leurs origines comme motif principal de discrimination.

Subir des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail abaisse fortement la satisfaction retirée de l’emploi occupé : seules 62 % des personnes concernées se déclarent satisfaites de leur emploi, contre 90 % des autres ; 33 % des premières souhaitent ainsi changer d’emploi, contre 11 % des secondes.

En 2021, 9 % des personnes en emploi jugent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail

En 2021, 9,1 % des personnes en emploi âgées de 15 à 74 ans déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel (figure 1). Ce ressenti peut être la traduction de faits effectivement vécus dans le cadre professionnel, mais aussi le reflet d’une plus ou moins grande sensibilité à la question des discriminations.

Figure 1 – Déclaration de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail selon les caractéristiques individuelles en 2021

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Figure 1 – Déclaration de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail selon les caractéristiques individuelles en 2021 (en %) - Lecture : En 2021, 11,3 % des femmes en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
Caractéristiques Avec motif discriminatoire Avec motif non discriminatoire Sans motif Ensemble
Sexe
Femmes 6,5 4,1 0,8 11,3
Hommes 3,1 3,1 0,8 7,0
Âge
15-29 ans 3,0 1,6 0,4 5,0
30-49 ans 5,3 3,8 0,7 9,8
50-74 ans 5,0 4,5 1,1 10,6
Niveau de diplôme
Diplôme inférieur au baccalauréat 4,0 3,7 0,9 8,6
Baccalauréat à bac+2 4,5 3,8 0,7 9,1
Bac+3 ou plus 6,0 3,2 0,7 9,8
Origines
Immigrés 6,6 1,8 1,0 9,5
Descendants d’immigrés 6,2 3,0 0,6 9,7
Sans ascendance migratoire directe 4,4 3,9 0,8 9,0
État de santé
Très bon ou bon 4,0 3,1 0,6 7,7
Assez bon 7,7 5,6 1,5 14,8
Mauvais ou très mauvais 14,4 7,5 1,5 23,4
Ensemble 4,8 3,6 0,8 9,1
  • Lecture : En 2021, 11,3 % des femmes en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Figure 1 – Déclaration de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail selon les caractéristiques individuelles en 2021

  • Lecture : En 2021, 11,3 % des femmes en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Dans le module complémentaire de l’enquête Emploi 2021 (sources), une dizaine de motifs discriminatoires au sens du Code pénal était proposée aux personnes ayant subi un traitement inégalitaire ou une discrimination au travail, parmi lesquels l’âge, le sexe, les origines, l’état de santé, etc. (encadré 1). Plus de la moitié des personnes en emploi déclarant avoir subi des traitements inégalitaires au travail évoquent un motif discriminatoire, soit 4,8 % des personnes en emploi. 3,6 % des personnes en emploi évoquent d’autres motifs, liés à leur environnement de travail mais sans caractère discriminatoire. Elles citent notamment les problèmes relationnels avec leurs collègues ou leur hiérarchie, les conditions de travail qu’elles jugent défavorables, le manque de reconnaissance, particulièrement salariale, le fait d’occuper un emploi mal considéré au sein de la société, ou encore les situations de favoritisme. Enfin, 0,8 % des personnes en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel mais n’en précisent pas le motif.

Le sexisme, principal motif de discrimination au travail

En 2021, les femmes en emploi déclarent davantage que les hommes avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail : 11,3 % contre 7,0 %. C’est aussi le cas dans les autres pays de l’Union européenne (encadré 2).

Parmi les femmes déclarant avoir fait l’objet de traitements inégalitaires dans leur emploi actuel, 30 % estiment que le sexisme en est la principale raison, contre seulement 2 % de leurs homologues masculins (figure 2). Au total, le motif sexiste est la première source de discrimination au travail, cité par 19 % des personnes en emploi déclarant des traitements inégalitaires ou des discriminations.

Figure 2 – Motif principal déclaré de discrimination au travail selon les caractéristiques individuelles en 2021

Figure 2 – Motif principal déclaré de discrimination au travail selon les caractéristiques individuelles en 2021 - Lecture : En 2021, 19 % des personnes déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail citent leur sexe comme principal motif ; cette part atteint 30 % pour les femmes dans cette situation.
Motif principal de discrimination Caractéristiques Part (en %)
Discrimination selon le sexe Femmes 30
Hommes 2
Ensemble 19
Discrimination selon l’âge 15-29 ans 17
30-49 ans 4
50-74 ans 9
Ensemble 7
Discrimination selon les origines Immigrés 57
Descendants d’immigrés 21
Sans ascendance migratoire directe 3
Ensemble 11
Discrimination selon l'état de santé ou le handicap Très bon ou bon 3
Assez bon 11
Mauvais ou très mauvais 21
Ensemble 6
  • Lecture : En 2021, 19 % des personnes déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail citent leur sexe comme principal motif ; cette part atteint 30 % pour les femmes dans cette situation.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi et déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Figure 2 – Motif principal déclaré de discrimination au travail selon les caractéristiques individuelles en 2021

  • Lecture : En 2021, 19 % des personnes déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail citent leur sexe comme principal motif ; cette part atteint 30 % pour les femmes dans cette situation.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi et déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Ce constat n’est pas limité au cadre professionnel : entre 2008-2009 et 2019-2020, l’augmentation du sentiment de discrimination, tous domaines de la vie confondus, est portée par les femmes et le motif sexiste [et al., 2022]. Dans l’emploi, le motif sexiste est d’autant plus cité que les femmes sont diplômées : 43 % des diplômées de niveau bac+3 ou plus déclarant avoir fait l’objet de traitements inégalitaires ou de discriminations l’évoquent, contre 18 % des titulaires d’un diplôme inférieur au baccalauréat. Au total, et contrairement aux hommes, plus les femmes sont diplômées et plus elles déclarent de traitements inégalitaires au travail : 13,0 % pour les diplômées de niveau bac+3 ou plus, contre 10,1 % pour les titulaires d’un diplôme inférieur au baccalauréat. Par ailleurs, cette part varie aussi selon la situation familiale : 15,2 % des femmes à la tête d’une famille monoparentale s’estiment victimes de traitements inégalitaires au travail, contre 12,0 % des mères vivant en couple et 11,2 % des femmes vivant seules sans enfant.

Plus de la moitié des immigrés déclarent leurs origines comme motif principal de discrimination

Les origines sont le deuxième motif de discrimination le plus cité par les personnes en emploi déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans l’emploi (11 %). C’est particulièrement ressenti parmi les immigrés et leurs descendants. Ainsi, en 2021, 57 % des immigrés et 21 % des descendants d’immigrés mettent en relation des traitements inégalitaires vécus avec leurs origines. Au total, 4,9 % des immigrés en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations liés à leurs origines, contre 0,3 % des personnes sans ascendance migratoire directe. En revanche, les immigrés tendent à peu déclarer des traitements inégalitaires sans motif discriminatoire, si bien qu’au total ils sont à peine plus nombreux que les personnes sans ascendance migratoire directe à juger avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi (9,5 % contre 9,0 %).

Près d’une personne en mauvais état de santé sur quatre déclare avoir subi des traitements inégalitaires au travail

En 2021, 23,4 % des personnes en emploi s’estimant en mauvais ou très mauvais état de santé déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail, contre 7,7 % des personnes jugeant être en bon ou très bon état de santé. Les personnes en emploi en mauvais ou très mauvais état de santé sont 21 % à considérer que ces traitements sont principalement imputables à leur état de santé ou à leur handicap, ce motif étant pour elles le plus cité, devant le sexe.

Bien que ces personnes soient plus âgées que l’ensemble de la population en emploi (plus de la moitié ont entre 50 et 74 ans, contre un tiers en moyenne) et que les plus âgés déclarent plus fréquemment avoir été victimes de traitements inégalitaires ou de discriminations, ce constat reste vrai à caractéristiques individuelles (âge, sexe, diplôme, etc.) et d’emploi identiques.

L’état de santé et le handicap, ainsi que l’âge, sont des motifs davantage évoqués parmi les plus âgés que parmi les personnes en emploi d’âge intermédiaire. En outre, les plus âgés évoquent aussi un peu plus fréquemment des traitements inégalitaires sans motif discriminatoire.

À l’opposé, les jeunes de 15 à 29 ans en emploi déclarent deux fois moins souvent que leurs aînés avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail (5,0 %, contre 9,8 % parmi les 30-49 ans et 10,6 % parmi les 50-74 ans). 17 % des plus jeunes considèrent que leur âge est la source principale des traitements inégalitaires vécus, soit deux fois plus que les 50-74 ans.

14 % des fonctionnaires déclarent avoir subi des traitements inégalitaires au travail

En 2021, 13,7 % des fonctionnaires et 9,6 % des détenteurs d’un CDI déclarent avoir subi des traitements inégalitaires, contre 4,6 % des salariés en contrat à durée déterminée, en intérim, en alternance ou en stage (figure 3). Par ailleurs, la proportion de personnes en emploi qui déclarent avoir subi des traitements inégalitaires dans leur emploi actuel augmente avec la taille de l’entreprise : elle passe de 6,6 % parmi les personnes en emploi dans les entreprises de moins de 10 salariés à 11,7 % dans les entreprises de 250 salariés ou plus.

Figure 3 – Déclaration de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail selon les caractéristiques de l’emploi en 2021

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Figure 3 – Déclaration de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail selon les caractéristiques de l’emploi en 2021 (en %) - Lecture : En 2021, 8,8 % des cadres en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
Caractéristiques Avec motif discriminatoire Avec motif non discriminatoire Sans motif Ensemble
Cadres 5,7 2,6 0,6 8,8
Professions intermédiaires 5,2 4,8 0,8 10,9
Employés 4,9 4,3 0,8 10,0
Ouvriers 3,6 2,7 0,8 7,1
Indépendants 3,3 2,3 1,1 6,7
Fonctionnaires 6,5 6,3 0,9 13,7
CDI 5,2 3,6 0,8 9,6
CDD, Intérim, alternance, stage, sans contrat 2,5 1,8 0,2 4,6
Moins de 10 personnes 3,3 2,6 0,8 6,6
10 à 19 personnes 3,8 3,8 0,7 8,3
20 à 49 personnes 5,8 3,4 0,9 10,1
50 à 249 personnes 5,4 4,1 0,8 10,3
250 personnes ou plus 6,2 4,7 0,8 11,7
Ensemble 4,8 3,6 0,8 9,1
  • Lecture : En 2021, 8,8 % des cadres en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Figure 3 – Déclaration de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail selon les caractéristiques de l’emploi en 2021

  • Lecture : En 2021, 8,8 % des cadres en emploi déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Cette plus grande propension des fonctionnaires et des salariés des grandes entreprises à déclarer avoir subi des traitements inégalitaires s’explique en partie par le fait qu’ils occupent leur emploi depuis en moyenne plus longtemps (72 % des fonctionnaires ont une ancienneté de 10 ans ou plus, contre 44 % des titulaires d’un CDI ; et c’est le cas de 55 % des salariés des entreprises de 250 salariés ou plus, contre 36 % dans les entreprises de moins de 10 salariés). Ils ont donc une plus grande probabilité d’avoir été confrontés à ces situations. En outre, cela peut aussi s’expliquer par une sensibilisation plus forte dans la fonction publique et les grandes entreprises (campagnes de prévention, dispositifs obligatoires de signalement, désignation de référents, etc.).

Un tiers des cadres déclarant avoir subi des traitements inégalitaires au travail citent un motif sexiste

Les indépendants déclarent nettement moins souvent de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail que l’ensemble des personnes en emploi (6,7 % contre 9,1 %). Cela peut s’expliquer par un environnement de travail qui limite ce type de situations, notamment sans hiérarchie. En outre, les indépendants sont souvent des hommes, qui déclarent moins fréquemment subir ce type de traitements.

Parmi les salariés, ce sont les professions intermédiaires (10,9 %) et les employés (10,0 %) qui déclarent le plus souvent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail, tandis que les ouvriers en déclarent le moins souvent (7,1 %). Si la part de cadres déclarant avoir subi des traitements inégalitaires au travail (8,8 %) est moindre qu’en moyenne, ils citent davantage des motifs discriminatoires, en particulier en raison de leur sexe (33 %, contre 19 % de l’ensemble des personnes en emploi) ou de leur âge (11 % contre 7 %). Plus spécifiquement, plus de la moitié des femmes cadres déclarant avoir fait l’objet de traitements inégalitaires dans leur emploi actuel estiment que le sexisme en est le principal motif.

Un tiers des personnes ayant subi des traitements inégalitaires au travail souhaitent changer d’emploi

Subir des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail pèse sur la satisfaction relative à l’emploi occupé. En effet, en 2021, si 90 % des personnes estimant ne pas avoir subi de traitements inégalitaires au travail se disent plutôt satisfaites ou très satisfaites de leur emploi, cette proportion n’est que de 62 % parmi celles déclarant au contraire en avoir fait l’objet (figure 4). Ce constat est valable que le motif soit discriminatoire ou non, et demeure en contrôlant l’effet des caractéristiques individuelles et de l’emploi. Plus encore, seules 18 % d’entre elles déclarent être très satisfaites de leur emploi actuel, contre 44 % des personnes déclarant ne pas avoir subi de traitements inégalitaires au travail.

Figure 4 – Traitements inégalitaires ou discriminations au travail et satisfaction relative à l’emploi occupé en 2021

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Figure 4 – Traitements inégalitaires ou discriminations au travail et satisfaction relative à l’emploi occupé en 2021 (en %) - Lecture : En 2021, 62 % des personnes en emploi déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail se disent plutôt ou très satisfaites de leur emploi.
Catégorie Traitements inégalitaires ou discriminations au travail Pas de traitement inégalitaire ou de discrimination au travail
Très ou plutôt satisfaits de l’emploi occupé 62 90
Souhaitent un autre emploi en remplacement de l’emploi actuel 33 11
  • Lecture : En 2021, 62 % des personnes en emploi déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail se disent plutôt ou très satisfaites de leur emploi.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Figure 4 – Traitements inégalitaires ou discriminations au travail et satisfaction relative à l’emploi occupé en 2021

  • Lecture : En 2021, 62 % des personnes en emploi déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail se disent plutôt ou très satisfaites de leur emploi.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Les personnes qui déclarent être victimes de discriminations ont à leur disposition différents types de recours légaux, mais elles n’entreprennent que rarement de telles démarches [et al., 2022]. Elles sont toutefois plus enclines à quitter cet environnement professionnel. Ainsi, un tiers des personnes estimant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel souhaitent changer d’emploi, soit trois fois plus que les personnes en emploi qui ne sont pas dans cette situation. Là aussi, ce constat est vrai que les personnes évoquent un motif discriminatoire ou un autre motif.

Encadré 1 – Les enjeux de la mesure des traitements inégalitaires et des discriminations

La discrimination dans l’emploi peut être mesurée objectivement, par le biais de testings à l’embauche ou de comparaisons fines de niveau de salaire ou de position dans l’entreprise ; mais de telles mesures sont le plus souvent restreintes à des contextes ou des sous-populations particulières. Dans cette étude, la mesure porte sur une question subjective : « Dans votre emploi actuel, pensez-vous avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations ? ». Cette formulation est identique à celle de l’enquête Trajectoires et Origines (TeO), qui fait référence sur le sujet de la discrimination en France. Elle diffère sur la période de référence et sur le contexte, mais les résultats sont cohérents : d’après l’enquête TeO, en 2019-2020, 18 % des personnes de 18 à 49 ans déclarent avoir subi un tel traitement [et al., 2022], dont 60 % dans le cadre du lieu de travail ou de la recherche d’emploi [Insee, 2023].

Les personnes répondant par l’affirmative à cette question sont ensuite invitées à en donner le principal motif (âge, sexe, origines, lieu de vie, handicap, état de santé, apparence physique, orientation sexuelle, appartenance ou opinions syndicales ou politiques, ou un autre motif). Il n’est pas possible de savoir quelle part des personnes en emploi se déclarent discriminées selon tel motif, les personnes devant choisir un motif principal. Cependant, dans l’enquête TeO, la part de personnes de 18 à 59 ans déclarant plusieurs motifs est faible (6 %).

La modalité « autre motif » a, dans la grande majorité des cas, été accompagnée d’un libellé en clair, ce qui a permis d’en reclasser les réponses. Certaines sont reclassées dans les motifs proposés dans le questionnaire ou bien identifiées comme des motifs discriminatoires au sens du Code pénal. D’autres correspondent à des motifs non discriminatoires, liés par exemple à des problèmes relationnels au travail, une mauvaise considération du métier, du favoritisme, des conditions de travail particulières (le fait d’être à temps partiel ou d’avoir des horaires atypiques), au niveau de compétences, etc. (figure).

Motif principal de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail en 2021

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Motif principal de traitements inégalitaires ou de discriminations au travail en 2021 (en %) - Lecture : En 2021, parmi les personnes déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail, 19 % indiquent que le motif sexiste en est la principale raison.
Motif Femmes Hommes Ensemble
Motif discriminatoire 59 46 54
Sexe 30 2 19
Origines 8 14 11
Âge 6 9 7
Opinions syndicales ou politiques 4 9 6
État de santé, handicap 6 6 6
Apparence physique 2 2 2
Lieu de vie 1 1 1
Orientation sexuelle 0 1 1
Autre 2 2 2
Motif non discriminatoire (problèmes relationnels, conditions de travail, manque de reconnaissance, emploi mal considéré, favoritisme) 37 47 41
Sans motif 4 7 5
Ensemble 100 100 100
  • Lecture : En 2021, parmi les personnes déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail, 19 % indiquent que le motif sexiste en est la principale raison.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi et déclarant avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans leur emploi actuel.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2021 et module complémentaire à l’enquête Emploi 2021.

Sur cette question, 23 % des réponses sont recueillies auprès d’un tiers (« proxy »). Si les niveaux observés diffèrent selon que la réponse est faite par « proxy » ou non, la répartition des motifs ainsi que les différences par caractéristiques sont similaires.

Encadré 2 – Les motifs de traitements inégalitaires ou de discriminations dans l’emploi en Europe

Le module complémentaire de l’enquête Emploi a été posé en 2021 dans tous les pays européens. Cependant, la formulation des questions et la diversité des motifs proposés varient selon les pays, ce qui peut avoir une influence sur les résultats. Ainsi, en France, la question porte sur les « traitements inégalitaires ou discriminations », pour assurer la comparabilité avec l’enquête Trajectoires et Origines, alors que dans la plupart des pays européens la question porte sur les seules « discriminations ». Outre ces différences de questionnement, les différences de mesure entre pays peuvent également refléter des écarts de sensibilité à la question des discriminations, des différences d’ampleur des pratiques discriminatoires ou encore des différences de législation, certains pays allant au-delà des six motifs réglementaires définis par l’Union européenne (UE).

En 2021, 5 % des personnes en emploi dans l’UE déclarent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations dans l’emploi (figure). Cette proportion est plus élevée au Luxembourg (15 %), en France (9 %), au Portugal (8 %) et, dans une moindre mesure, en Allemagne (6 %) et dans les pays scandinaves. Les pays de l’ancien bloc de l’Est sont ceux où la part de travailleurs qui déclarent avoir subi des discriminations est la plus faible (moins de 3 %).

Personnes en emploi déclarant avoir subi des discriminations au travail, selon le motif et le pays, en 2021

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Personnes en emploi déclarant avoir subi des discriminations au travail, selon le motif et le pays, en 2021 (en %) - Lecture : En 2021, en Allemagne, 6 % des personnes en emploi déclarent avoir été discriminées dans le cadre de leur travail, 0,3 % en raison de leur âge.
Pays Âge, sexe, origine étrangère, handicap et autre raison Âge Sexe Origine étrangère Handicap Autre raison Raison non identifiable
Allemagne 6 0,3 1,3 1,1 0,2 3,6 0,0
Bulgarie 1 0,3 0,3 0,2 0,0 0,3 0,0
Finlande 7 1,0 1,0 0,8 0,5 3,3 0,0
France 9 0,6 1,6 0,8 0,0 5,8 0,1
Luxembourg 15 1,1 2,6 3,6 0,2 7,7 0,0
Pologne 2 0,1 0,3 0,1 0,0 1,1 0,0
Portugal 8 0,5 1,2 0,5 0,0 6,1 0,1
Union européenne 5 0,4 0,9 0,7 0,1 2,6 0,0
  • Note : Lorsque les effectifs sont trop faibles pour estimer la proportion des discriminations subies selon chaque motif, ceux-ci sont regroupés dans la modalité « Raison non identifiable ».
  • Lecture : En 2021, en Allemagne, 6 % des personnes en emploi déclarent avoir été discriminées dans le cadre de leur travail, 0,3 % en raison de leur âge.
  • Champ : Union européenne à 27 pays, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi.
  • Sources : Instituts nationaux de statistique, Eurostat, enquête sur les forces de travail 2021 (extraction en octobre 2023).

Personnes en emploi déclarant avoir subi des discriminations au travail, selon le motif et le pays, en 2021

  • Note : Lorsque les effectifs sont trop faibles pour estimer la proportion des discriminations subies selon chaque motif, ceux-ci sont regroupés dans la modalité « Raison non identifiable ».
  • Lecture : En 2021, en Allemagne, 6 % des personnes en emploi déclarent avoir été discriminées dans le cadre de leur travail, 0,3 % en raison de leur âge.
  • Champ : Union européenne à 27 pays, personnes de 15 à 74 ans vivant en logement ordinaire, en emploi.
  • Sources : Instituts nationaux de statistique, Eurostat, enquête sur les forces de travail 2021 (extraction en octobre 2023).

Malgré ces différences, des résultats similaires se dégagent dans de nombreux pays européens. D’une part, dans tous les pays de l’UE, les femmes en emploi déclarent plus souvent que les hommes avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations au travail : elles sont 6 % en moyenne dans l’UE, contre 4 % pour les hommes, soit un écart similaire à celui observé en France. D’autre part, les personnes nées à l’étranger ou dont au moins un parent est né à l’étranger déclarent aussi plus souvent avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations : 8 %, contre 5 % de l’ensemble des personnes en emploi au sein de l’UE.

Publication rédigée par :Émilie Pénicaud, Nathan Rémila (Insee)

Sources

L’enquête Emploi est la seule source permettant de mesurer le chômage et l’activité au sens du Bureau international du travail (BIT). Elle est menée en continu sur l’ensemble des semaines de l’année, en France hors Mayotte, auprès des personnes de 15 ans ou plus vivant en logement ordinaire (c’est‑à‑dire hors foyers, hôpitaux, prisons, etc.). Chaque année, un module complémentaire, d’initiative européenne (Eurostat) et subventionné par l’Union européenne, est posé à un sous‑échantillon. En 2021, ce module porte sur la situation des migrants et de leurs descendants directs sur le marché du travail, et une partie de ce module porte sur la discrimination au travail. Ce module est réalisé dans l’ensemble des pays de l’Union européenne, permettant des comparaisons européennes. Néanmoins, cette étude est de la responsabilité de l’Insee et n’engage pas la Commission européenne.

Pour en savoir plus

Retrouvez plus de données en téléchargement.

Ouvrir dans un nouvel onglet Self‑perceived discrimination at work -
statistics
”, Eurostat, août 2023.

Fiche « Discriminations », in Immigrés et descendants d’immigrés en France, coll. « Insee Références », édition 2023.

Lê J., Rouhban O., Tanneau P., Beauchemin C., Ichou M., Simon P., « En dix ans, le sentiment de discrimination augmente, porté par les femmes et le motif sexiste », Insee Première n° 1911, juillet 2022.