Marketing culturel
L'ART ET L'ARTISANAT D'ART EN QUÊTE DE RÉASSURANCE
·
Enjeux des labels et des ateliers
VIRGINIE DE BARNIER ET JOËLLE LAGIER
Virginie DE BARN/ER, Professeur des Universités, IAE Aix-en-Provence CERGAM (EA 4225), Aix-Marseille Université,
Chercheur Groupe Wesford,
セᄋ@ •
Contact: Virginie.De-Barnier@ iae-aix.com
Joëlle LAGIER, Professeur permanent Département Marketing Rouen Business School Pôle de Recherche « Jeunes et pratiques responsables de la consommation» (Rouen Business School) and Laboratoire CERMAB (l.A.E de Dijon)
Contact: jlg@rouenbs.fr
Les auteurs tiennent à remercier les trois lecteurs anonymes de DM pour leurs commentaires et suggestions, le professeur
Elyette Roux pour ses conseils et ses encouragements ainsi que les responsables des Ateliers d'Art de France pour leur aide.
Le nom des auteurs suit l'ordre alphabétique, les deux auteurs ayant contribué de manière égale à l'article.
Cet article tente d'analyser la relation spécifique qui se crée
entre un acheteur d'art ou d'artisanat d'art et le créateur.
Des études qualitatives (entretiens semi-directifs et focus
groupes) ont été menées auprès d'experts de l'art et de
consommateurs d'objets d'art afin d'appréhender quatre
éléments importants dans cette relation : la perception de
l'objet d'art, les critères de choix de l'objet d'art par l'acheteur, les craintes ressenties par l'acheteur et les éléments de
réassurance acceptés. Deux éléments de réassurance ont
été étudiés: les labels et les visites d'atelier d'art. Une analyse de ces deux éléments montre comment ils concourent
à rassurer l'acheteur en répondant à ses besoins à la fois
rationnels et émotionnels et en donnant du sens à son achat.
FINE ART AND CRAFT ART SEEKING REASSURANCE:
ROLES OF LABELS AND WORKSHOP VISITS
This article attempts to analyze the specifie relationship that
develops between a buyer of art or crafts and the creator.
Qualitative studies (semi-structured interviews and focus
groups) were conducted with art experts and art consumers
ta understand four important elements in this relationship:
perception of the art abject, criteria for selecting the art
abject by the buyer, the buyer's fears and the elements of
reinsurance accepted. Two elements of reinsurance were
studied: the labels and workshop visits. An analysis ofthese
two elements shows how they help to reassure the customer
by meeting their needs bath rational and emotional and giving meaning to its purchase.
Mots-dés : art, artisanat d'art, perception, réassurance,
Key Words: fine art, craft art, perception, reassurance,
labels, cultural experience.
label, expérience culturelle.
Décisions Marketing N°65 Janvier-Mars 2012- 9
L'art et l'artisanat d'art en quête de réassurance
E
n février 2009, sous la nef du Grand Palais à
Paris, un événement d'exception redynamise
le marché de l'art en France : Christie's vend la
collection d'art du créateur Yves Saint Laurent et de son
compagnon Pierre Bergé. Les ventes globales enregistrent un record de 230 millions de dollars et 25 œuvres
sont achetées à plus d'un million de dollars. Malgré
quelques événements remarquables de ce type, le marché mondial de l'art se remet néanmoins difficilement
de l'éclatement de la bulle spéculative de 2008 et des
répercussions de la crise financière. Pour illustration, les
enchères dépassant le million de dollars ont diminué de
59% entre 2007 et 2009 1 . Dans ce contexte, la France
subit encore plus durement la crise. Son taux d'œuvres
invendues s'élève à 43%, une des plus mauvaises performances mondiales avec l'Italie et l'Allemagne. C'est
le marché haut de gamme qui se contracte le plus, avec
en particulier un très fort déclin de l'art contemporain,
contrebalancé par des marchés de l'art ancien et de l'art
moderne qui résistent mieux à la crise. Dans cet environnement de défiance et de crise financière, les professionnels tentent de trouver des indicateurs fiables
afin d'apprécier l'évolution du marché. Artprice crée
en 2008 un nouvel indicateur de confiance permettant
d'appréhender en temps réelles tendances du marché:
l'Art Market Confidence Index (AMCF). En 2009, cet
indice atteint un niveau plancher de - 20 points, reflet
d'une crise de confiance importante. Cette crise touche
tous les acteurs du marché, des professionnels aux acheteurs, les amenant à modifier considérablement leur
comportement. Selon Ehrmann, PDG d'Artprice 3 : << la
crise a profondément modifié la psychologie du marché, privilégiant le discernement contre l'engouement,
la prudence contre l'urgence d'acquisition, la réflexion
contre le suivisme>>.
Dans cet univers spécifique)' artisanat d'art, mouvement
culturel de la fin du xxe siècle, voit cependant son im-
portance croître en France. II constitue, en effet, un marché d'art plus accessible à la fois sur le plan des œuvres
et sur le plan psychologique pour le consommateur en
quête de repères et de réassurance constante. La définition précise de l'artisanat d'art est complexe du fait de
la diversité des métiers exercés. Selon la nomenclature
officielle élaborée par M. Dutreil, ministre en charge de
l'artisanat en 2003, la liste des métiers de l'artisanat d'art
comprend 217 métiers, classés en 19 domaines définis
selon le matériau ou l'activité 4 • Représenté par le syndicat des ateliers d'art de France (AAF 5) créé en 1968,
l'artisanat d'art regroupe aujourd'hui plus de 40 000
entreprises à travers l'Hexagone et représente un pôle
important de l'économie française (encadré 1). Selon la
Société d'Encouragement aux Métiers d'Art (SEMA), ce
secteur affiche un chiffre d'affaires de 8 milliards d'euros
en 2009, dont 8,1% réalisé à l'exportation et« constitue
l'essence du secteur du luxe français qui réalise, de son
côté, plus de 22 milliards d'euros de chiffre d'affaires
dont 82% à l'exportation >>6 . Or, la frontière entre art et
artisanat d'art est étroite (15) et les confusions entre ces
deux univers, et même celui du luxe, sont récurrentes
dans la littérature, comme dans le monde professionnel.
Aussi, le premier objectif de cet article est d'étudier les
perceptions qu'ont les acheteurs de l'art, de l'artisanat
d'art et du luxe afin de déterminer les éléments en jeu
dans la relation spécifique qui se crée entre l'acheteur
et le créateur.
Mais si l'artisanat d'art présente pour l'acheteur une
démocratisation de l'art lui permettant d'amoindrir la
barrière financière, cette extension de gamme vers le
bas pose les mêmes problématiques que la démocratisation du luxe, celles liés à la dilution de l'image (13).
Cette dilution accroit le risque perçu par les acheteurs
qui expriment clairement des craintes et demandent à
être rassurés. Le second objectif de cet article est donc
d'identifier ces craintes et de proposer des éléments de
Encadré 1 : Les Ateliers d'Art de France : Le premier syndicat professionnel des métiers d'a rf
Fondé en 1868, Ateliers d'Art de France est le premier syndicat professionnel des métiers d'art. Sa mission principale est
d'accompagner les quelque 2 800 adhérents (artistes, artisans et manufactures) et de faire rayonner le secteur au niveau
régional, national et international. Il représente la profession auprès des pouvoirs publics et des organismes professionnels, en France et à l'étranger. Il compte vingt-huit délégués régionaux à travers toute la France.
Le syndicat définit les métiers d'art comme des métiers impliquant le travail de la main, l'organisation en atelier et nécessitant la maîtrise d'un savoir-faire spécifique alliée à une véritable créativité. Ces professionnels fabriquent des pièces
uniques ou des petites et moyennes séries à partir d'un large éventail de matériaux: céramique, verre, métal, textile, bois,
papier, résine, osier, cuir...
Les professionnels des métiers d'art adoptent différents statuts juridiques et fiscaux : artisans inscrits en chambre de métiers, artistes affiliés à la maison des artistes ou professions libérales ...
Le syndicat a créé en janvier 2002 la marque CreatedinFrance® pour promouvoir les entreprises françaises des métiers
d'art sur les marchés étrangers ainsi qu'un site de promotion www.createdinfrance.com conçu avec le soutien du ministère
de l'économie, des finances et de l'industrie afin d'assurer la promotion des entreprises françaises auprès d'acheteurs
étrangers. Ateliers d'Art de France édite également tous les deux mois un magazine d'information intitulé« Ateliers d'Art»
et publie régulièrement un baromètre issu de la consultation de ses adhérents à travers l'observatoire des métiers d'art.
Ateliers d'Art de France a ouvert trois boutiques « Talents à Paris » (quartier étoile et quartier opéra) afin de mettre en
scène la poésie et le savoir-faire de 300 artisans d'art.
10- Virginie De BARNIER et Joëlle LAGIER
Marketing culturel
réassurance pour l'acheteur face à des objets et des créations de plus en plus difficiles à répertorier et à évaluer.
La perception des frontières entre art,
art1sanat d'art et luxe
Ainsi nous avons réalisé une série d'études qualitatives
auprès d'experts et d'acheteurs d'art afin de mieux appréhender les frontières entre art, artisanat d'art et luxe
et d'élaborer une carto$raphie à partir des verbatims
des acteurs permettant :de différencier clairement ces
trois univers. Les résultats de ces études sont présentés
en première partie. nッセウ@
étudions dans une seconde
partie les craintes et les セャ←ュ・ョエウ@
de réassurance perçus
par l'acheteur. Nous analysons enfin, dans une troisième
partie, comment ces éléments de réassurance peuvent
être appliqués et sous セオ・ャ@
forme, en nous centrant
sur les labels et les visiter d'atelier.
Les participants des trois focus groupes ainsi que les experts ont tout d'abord manifesté une perception de l'art
assez homogène. Ainsi, l'art est généralement perçu
comme issu de la créativité de l'artiste, une innovation
pure, qui va au-delà d'un simple savoir-faire. Il exige la
présence d'un véritable don (<< Un artiste a un don à la
base>> ; <<l'âme de l'artiste se ressent dans les objets: il y
1
Analyse des ←ャセ・ョAウ@
en ieu dans la
relation acheteur-createur
Afin d'appréhender de manière globale la relation
acheteur-créateur, nous avons mis en œuvre une série
d'études qualitatives dont la méthodologie est décrite
dans l'encadré 2. L'objectif de ces différentes études,
réalisées auprès d'acheteur d'art, d'artisanat d'art et
d'experts des deux marchés, était double : mieux comprendre dans un premier temps, les perceptions de
l'art, de l'artisanat d'art et du luxe afin de discerner les
frontières de ces univers ; mieux appréhender, dans un
second temps, l'acte d'achat afin d'identifier les principaux critères de choix de ces objets. Les résultats de
ces études sont présentés dans les deux parties suivantes.
a un savoirfaire mais aussi beaucoup de créativité>>).
Il caractérise des objets uniques. On le trouve essentiellement dans les musées et il est réservé à quelques privilégiés, connaisseurs de l'art. Il se caractérise par un
prix très élevé, inaccessible. Globalement il fait partie
du registre du génie et de l'inspiration.
Par opposition à l'art, l'artisanat est perçu comme le
respect d'une tradition, la résultante d'un apprentissage,
d'un savoir-faire. L'artisanat se caractérise par des produits accessibles en termes de prix et de technique (<< il
y a un apprentissage, on pourrait apprendre à faire
pareil>>). Il n'est pas nécessairement considéré comme
d'un niveau de qualité supérieur et est perçu comme
plus directement fonctionnel (<< le peintre en bâtiment,
l'électricien, le taxi sont des artisans >>).L'artisanat se
1
situe doiJ,c'dans le registre de la technique et du savoiri·
faire.
Le domaine du luxe est spontanément évoqué par les
participants qui associent luxe et art (L'art, c'est du
luxe, c'est inutile, c'est un luxe que l'on se permet). On
note également une relative confusion entre les univers
de l'artisanat et du luxe. Certains objets sont considérés
comme appartenant à la fois au monde de l'artisanat et
Encadré 2 : Méthodologie des études qualitatives
les études qualitatives ont été réalisées en deux étapes. Tout d'abord des entretiens ont été réalisés auprès d'experts de
l'art (un galeriste, un commissaire-priseur, le président du syndicat de l'Atelier d'Art de France, un artiste peintre réputé,
un professeur d'art plastique et un critique d'art). Six entretiens semi directifs ont été réalisés afin de recueillir leur analyse
du marché de l'art et de l'artisanat d'art. les entretiens ont duré environ quatre heures chacun. Un guide d'entretien a
été élaboré et pour clore l'entretien, des documents étaient présentés aux experts afin de collecter leurs commentaires.
Certains documents émanaient de I'AAF: logo, enseignes et photos des boutiques, vitrines, plaquette, affiches, magazine
AAF, site Internet AAF, cartons de vernissage ... d'autres documents émanaient de domaines différents tels que la gastronomie, le luxe, le tourisme.
la seconde étape a constitué en l'organisation de trois foc us groupes afin de répondre à trois objectifs : identifier comment
les concepts d'art, d'artisanat d'art et d'artisanat sont compris ; appréhender les critères de choix d'un objet d'art ou
d'artisanat d'art ; identifier les résistances éventuelles au marketing de l'art et les éléments de réassurance acceptés. le
recrutement des participants s'est fait à partir d'un questionnaire en ligne auprès de 128 répondants du panel TestConso.
fr. les personnes retenues sur des critères quantitatifs (âge, sexe, revenu ... ) ont été ensuite sélectionnées par entretien
téléphonique afin de s'assurer de critères qualitatifs liés à leur bonne connaissance du milieu artistique. Au total le premier
focus groupe était composé de 10 participants entre 30 et 60 ans dont 8 femmes et 2 hommes. le second foc us group
était composé de 8 participants entre 26 et 55 ans dont 6 femmes et 2 hommes. le troisième focus groupe était composé
de 11 participants entre 23 et 62 ans dont 6 femmes et 5 hommes.
les entretiens issus des foc us groupes et des entretiens d'experts ont été intégralement enregistrés et retranscrits. les auteurs
ainsi qu'un expert en étude qualitative ont ensuite réalisé une analyse de contenu des entretiens, de manière individuelle.
Puis les trois analyses ont été comparées et ont révélé une grande homogénéité des résultats (Kappa de Cohen = 0,82).
Décisions Marketing N°65 Janvier-Mars 2012- 11
L'art et l'artisanat d'art en quête de réassurance
au monde du luxe. C'est le cas de la mode, l'horlogerie,
la joaillerie, ou les objets « inutiles >> au sens large du
terme(<< il peut quand même y avoir de l'artisanat de
luxe>>;<< la mode c'est de l'artisanat mais c'est du luxe
aussi ... pareil pour l'horlogerie de luxe>>). Lorsqu'on
tente d'appréhender quelles sont les différences perçues entre art et luxe, la dimension ostentatoire du luxe
et son caractère impersonnel sont évoqués (<<pour moi
le luxe, c'est bling bling >>) Il s'agit de produits beaux,
chers, mais des produits de marque pour lesquels l'artisan disparaît derrière la marque.
Entre l'art, le luxe et l'artisanat, apparaît un autre univers
nommé artisanat d'art. Ce dernier semble être compris aisément par les interviewés et ceci de manière
intuitive. Bien que les limites entre art, artisanat, luxe
et artisanat d'art se chevauchent parfois, l'artisanat d'art
est facilement appréhendé. Il est considéré comme différent de l'artisanat dans la mesure où il exige un niveau
d'excellence dans la maîtrise de la technique, il produit
des objets de grande valeur décorative et esthétique, il
est porteur d'un savoir-faire ancestral dans le temps ou
local dans l'espace. L'artisanat d'art est également perçu
comme un univers distinct du luxe dans la mesure où il
utilise des matériaux qui ne sont pas toujours précieux.
Les objets sont néanmoins personnalisés, l'artisan est
présent dans l'objet qui ne comporte pas de marque.
Le tableau 1 récapitule les perceptions issues des focus
groupes pour l'art, le luxe, l'artisanat d'art et l'artisanat
et les frontières entre ces quatre univers.
Il apparaît donc que la dimension essentielle permettant de différencier les univers d'art, d'artisanat d'art et
de luxe est la dimension personnelle. Les participants
des tables rondes s'accordent, en effet sur le fait que la
«personnalisation>> de l'objet d'artisanat d'art diffère
celle de l'œuvre d'art. L'œuvre d'art est le reflet d'une
individualité absolument unique et parfois connue à
travers le renom de l'artiste. L'art s'appuie exclusivement sur la créativité de l'artiste, celui-ci s'étant déjà
approprié sa propre technique, comme le montrent, par
exemple, les installations ou l'art vidéo. L'œuvre d'art a
pour mission de transmettre les propos de l'artiste et sa
vision de l'art ou du monde.
En revanche, les objets d'artisanat ou de luxe ne sont
pas perçus comme des objets permettant de refléter
cette individualité. Il n'y a pas de lien avec les créateurs
d'objets de luxe et les liens établis avec les artisans sont
des liens souvent fonctionnels et éphémères. Entre art
et artisanat, l'objet d'artisanat d'art répond à ce besoin
de personnalisation. Il correspond à l'empreinte personnelle laissée par le créateur mais peut être aussi le résultat de l'interface entre deux individualités : l'artiste et
l'acheteur qui aiment à se rencontrer, à discuter, à échanger. Ces différents objets peuvent ainsi être classés selon
leur degré de « personnalisation >> permettant d'établir
une hiérarchie entre l'art, l'artisanat d'art et le luxe
(figure 1). Cette hiérarchie montre que l'objet le plus
proche de l'œuvre d'art est l'objet d'artisanat d'art, en
particulier en termes d'unicité et de personnalisation.
Ces résultats corroborent les recherches antérieures
déjà établies sur le sujet, notamment concernant la créativité et la relation personnelle établie avec l'objet d'artisanat d'art et l'objet d'art, soulignant le caractère très
spécifique des rencontres, des échanges et globalement
des relations établies entre le créateur et l'acheteur (2,
3). Dès lors, il est intéressant d'étudier les critères de
choix des objets d'art et d'artisanat d'art afin de mieux
appréhender l'acte d'achat.
Tableau 1
Perceptions issues des focus groupes selon les univers présentés
Art
Luxe
Artisanat d'art
Artisanat
- Exige un don, une pure
créativité de l'artiste
- Réservé à quelques privilégiés
- Produits impersonnels
- Esthétisme et qualité
supérieure
- Produits de marque
- L'artisan disparait derrière la
marque
-Niveau d'excellence sur le
plan technique
- Objets de grande valeur
esthétique
-Porteur d'une tradition
- Savoir-faire ancestral dans le
temps et dans l'espace
- Une relation personnelle à
l'objet et au créateur
-Pas nécessairement d'un
niveau de qualité supérieur
- Plus directement fonctionnel
-Exige l'apprentissage d'une
technique, d'un savoir-faire
- Technicité accessible
- Essentiellement dans les
musées
- Distribution sélective
- Distribution assez facilement
accessible
- Présent partout
- Fin ali té Iibre
- Finalité extérieure à l'objet
- Finalité extérieure à l'objet
- Finalité extérieure à l'objet
- Prix inaccessible
- Prix accessible ou pas selon
les produits
- Prix accessible
- Prix accessible
-Unicité de l'objet
- Pas d'unicité de l'objet
- Unicité de l'objet
- Pas d'unicité de l'objet
Registre du génie et
de l'inspiration
La création pure
Registre de l'inaccessible
industriel
Registre du talent et du travail
Registre de la technique et
du savoir- faire
12- Virginie De BARNIER et Joëlle LAGIER
1
1
i
Marketing culturel
Figure 1 : Hiérarchisation des objets
Objets hyuer individualisés,
qui portent un style inimitable.
' L'artiste est célèbre ou coté
'
t
Objets uersonnels,
qui poretnt la trace de l'humain,
même si l'artisan n'est pas artiste
1
;
ou célèbre
t
l
1
L'œuvre d'art appartient à la première
catégorie (objets hyper individualisés) ;
l'objet d'artisanat d'art à la deuxième
catégorie (objets personnels) ; l'objet
d'artisanat et de luxe à la troisième catégorie (objets anonymes), même si les
objets de luxe se distinguent des objets i
d'artisanat par leur qualité supérieure et
leur distribution sélective.
Objets anonymes,
interchangeables,
impersonnels
Les critères de choix des objets d'art et
d'artisanat d'art
Globalement les participants des tables rondes ont tous
décrit une relation spécifique à l'objet d'artisanat d'art.
L'objet doit être un objet qui touche, qui éveille des
émotions, qui« parle>>, qui occupe une place à part dans
le parcours de l'acheteur.'' Moi quand j'achète quelque
chose de singulier, j'ai envie que ça interpelle mon
imaginaire >>.Les récits d'achat d'objets d'artisanat d'art
soulignent la dimension « coup de cœur >> et la relation
très forte qui unit la personne à« son objet>>. L'objet est
personnalisé et devient une nécessité selon un processus affectif très fort. «j'ai acheté y a pas très longtemps
une sérigraphie, c'était un achat coup de cœur ». En
conséquence, les participants soulignent la déception
qu'ils éprouveraient s'ils trouvaient le même objet
ailleurs, chez des amis, ou dans une autre boutique. Ils
ont besoin d'être certains de posséder un objet unique.
«j'ai acheté un miroir en Indonésie, que j'ai d'ailleurs
vu en réplique chez Conforama des années après et
ça m'a horrifiée». Cette relation personnelle à l'objet
est d'autant plus forte lorsque l'objet est réalisé « sur
mesure>>, ce qui contribue à magnifier ce rapport personnel à l'objet, avec l'idée qu'on participe soi-même
à son élaboration.« Pour mon service à vaisselle :j'ai
discuté avec l'artisan qui était là, j'ai choisi un service
d'assiettes en Jonction de la forme exposée, j'ai choisi
la couleur, j'ai conçu avec elle le service». L'objet peut
cristalliser une relation personnelle avec le créateur
même :l'acheteur aime discuter, construire une relation
personnelle avec lui, le suivre pendant plusieurs années,
voire devenir son ami.« C'est vraiment le coup de cœur
aussi avec la personne qui l'a fait, c'est en discutant
qu'avec le feeling je craque».« j'ai des vases de Novara, il fait des pâtes de verre soufflées.]'ai pas mal de
vases de lui. Ca fait 20 ans que je le suis ».L'objet porte
dans sa matérialité les traces de la présence de l'artisan
d'art qui l'a fabriqué. Et l'acheteur veut pouvoir ressentir que celui-ci a mis beaucoup de lui-même dans l'objet,
objet qui en porte le témoignage en termes de temps, de
travail et de personnalité.« Même dans les vases, on ne
retrouvera jamais deux fois le même défaut ». On voit
donc que l'objet d'artisanat d'art est traversé par une
dimension humaine et personnelle très forte, faisant défaut aux autres objets fabriqués en série ou aux objets
de luxe plus anonymes.
Six critèresfprincipaux ont été mentionnés par les participants tl'és focus groupes concernant les critères de
choix 、Gjセ@
objet d'artisanat d'art. Par ordre d'importance, il s'agit de la qualité, l'originalité, l'esthétisme,
l'unicité, l'aspect manuel et la matière. Le critère de
qualités intrinsèques et exceptionnelles de l'objet
d'artisanat d'art constitue le véritable critère central de
l'achat sur lequel l'ensemble des participants ont insisté.
Un objet d'artisanat d'art doit avant tout être d'une qualité supérieure irréprochable. L'objet doit présenter une
grande originalité. Il doit présenter des formes inconnues ou bizarres, être réalisé dans des matériaux rares,
présenter des qualités esthétiques évidentes. «j'ai acheté récemment un miroir avec une monture en bois
flotté, avec des décorations en plus, très originales,
faites avec des morceaux de verre ramassés, c'est
très créatif». L'unicité de l'objet est capitale. L'objet
peut ne pas être remarquable mais il doit toujours être
unique, c'est-à-dire ne pas être le résultat d'une fabrication industrielle mécanique et standardisée.« Pour moi
l'artisanat d'art, c'est rare, c'est une pièce unique»;
«C'est du jamais vu». L'aspect manuel et les traces du
geste de l'artiste doivent être perceptibles dans l'objet.
Le sens du toucher est fréquemment évoqué par les participants.« Y a des défauts, ça se voit que c'est pas fait
à la machine''· Les répondants soulignent tous l'intérêt
pour une matière «plus élaborée qu'à l'ordinaire,,, la
recherche d'un travail de la matière. Les objets d'artisanat d'art sont des objets «plus sophistiqués>> et l'on
aime y voir le travail de la matière ou bien le signe d'un
travail compliqué, original ou minutieux, souvent le fruit
d'un savoir-faire traditionnel transmis depuis plusieurs
générations. Certains répondants ont de véritables passions pour des matériaux et les collectionnent (résine,
verre, bois ... ).
Décisions Marketing N°65 Janvier-Mars 2012- 13
L'art et l'artisanat d'art en quête de réassurance
En ce qui concerne les œuvres d'art, les chercheurs (4,
8, 11) montrent que les critères de choix évoqués sont,
de leur côté, les suivants : la nature et l'intensité des
émotions déclenchées, la créativité, l'originalité,
·l'unicité, l'esthétisme du travail présenté aux côtés
de l'excellence de la réalisation (la qualité de l'exécution, les formes, les couleurs, les mouvements, la composition mais également le graphisme, la technique et
les matières utilisées). En dehors du prix (qui soulève un
débat important concernant la valeur artistique de l'objet), il semble ainsi exister une très forte similitude entre
les critères de choix des objets d'artisanat d'art et ceux
des œuvres d'art. Ce résultat est vraisemblablement lié
à la relation spécifique s'établissant entre l'acheteur et
le créateur. Cependant, à l'instar du secteur du luxe qui
met en place des stratégies de démocratisation, l'artisanat d'art peut présenter les mêmes risques de dilution
de l'image (13), contribuant ainsi à accroître le risque
perçu par les acheteurs et rendre plus difficile la relation acheteur-créateur. Afin de mieux comprendre les
enjeux de cette relation, nous avons donc tenté d'identifier lors des études qualitatives, les craintes perçues
par l'acheteur d'art et d'artisanat d'art ainsi que les éléments de réassurance acceptés. Les résultats sont présentés dans la partie suivante.
aョ。セウ・@
des craintes et des éléments
de reassurance perçus dans la
relation acheteur-créateur
L'achat d'un objet d'art ou d'artisanat d'art est un achat
très impliquant, les répondants des tables rondes l'expriment clairement : << c'est un achat important pour
moi>> ; <<je veux être sûre de ne pas me tromper>>. Afin
de faciliter les échanges, les acheteurs ont besoin d'être
rassurés, et, pour se faire, les créateurs cherchent à identifier leurs craintes. Nous avons donc abordé lors des
tables rondes les craintes perçues par les acheteurs. Les
résultats font l'objet de la première partie. Les résultats
concernant les facteurs de confiance recherchés et acceptés par ce dernier sont présentés dans la seconde
partie.
Les craintes perçues par /'acheteur
Les répondants des tables rondes sont conscients de ne
pas toujours avoir la culture suffisante et l'œil aguerri
face à des objets d'art ou d'artisanat d'art afin d'en apprécier la valeur. La crainte principale énoncée est liée
aux caractères de qualité et d'unicité de l'objet : ''je
croyais qu'il était unique alors qu'en réalité il ne l'est
pas,,;'' Il y a le même chez le voisin>>. Par opposition
à l'objet industriel, l'objet d'artisanat d'art doit être le
fruit d'un travail compliqué, qui exhibe les signes de sa
complexité, de sa finesse. Il doit être hyper investi par le
créateur, qui met beaucoup de lui-même et de sa personnalité dans sa réalisation. << L'artisan est passionné,
c'est pas du made in China >> ; <<Il met son âme dans ce
qu'il fait» ; << On voit qu'il y a un travail derrière, c'est
14- Virginie De BARNIER et Joëlle LAGIER
fait avec amour>>. Les craintes évoquées sont particulièrement vives lorsqu'il s'agit d'un achat destiné à un
cadeau, ce qui accroit vraisemblablement le caractère
impliquant de l'achat. L'acheteur veut pouvoir fournir
des gages d'authenticité, plus particulièrement lorsque
le prix payé est élevé, car l'achat est alors vu comme
un investissement en vue d'une revente éventuelle ou
d'un placement. « C'est bien aussi pour un cadeau
d'avoir un certificat d'authenticité, pour montrer à
la personne que c'est bien un vrai ». Dans ce cas, les
acheteurs s'appuient sur des preuves tangibles ou officielles de l'authenticité de l'objet telles que la côte
du créateur, sa renommée, ses précédentes réalisations publiques, sa biographie, sa formation ...
Alors que certains ont des comportements d'achat
impulsifs, du type'' coup de cœur,, d'autres expliquent adopter un comportement plus rationnel,
suite à une recherche active d'éléments de réassurance via Internet, les médias, la lecture de critiques ... ''Pour un designer connu, j'ai vu qu'il avait
déjà fait plein de choses, il a déjà décoré des restaurants, j'y suis allé et j'ai eu un choc esthétique»;<< Leur
formation, y a des écoles plus ou moins réputées » ;
<<Quelqu'un qui est sorti de l'école Boulle, on voit tout
de suite qu'il va savoir de quoi il parle>>. Globalement
les participants affirment se sentir perdus devant l'offre
du marché de l'art en général. Ils en ont parfaitement
conscience et expriment clairement le besoin d'être rassuré par des éléments tangibles : << Moi, je suis pas un
expert, j'ai besoin d'être rassuré.>>
Les facteurs de confiance recherchés et
acceptés par /'acheteur
Lorsque l'on aborde les éléments qui pourraient rassurer l'acheteur, les répondants évoquent spontanément
deux éléments principaux: le label et l'atelier d'art.
• Le label
Le principe d'un label ou d'une marque collective qui
assure l'authenticité des objets d'artisanat d'art sont
évoqués spontanément par les répondants. Interrogés sur ce sujet, ce principe est unanimement accepté
dans les focus groupes et auprès des experts. << Y a pas
une idée de lancer des labels ? >> ; << Il faudrait aussi
avoir quelque chose derrière la vitrine qu'on puisse
reconnaître :les compagnons ... un peu comme les logis de France >>.Les répondants acceptent l'idée d'un
label unique pour des objets qui relèvent de métiers
différents car malgré leurs spécificités, tous les métiers
d'artisanat d'art sont perçus comme appartenant à une
même famille, marquée par le respect du travail de l'artisan, la relation à la matière, et l'unicité de l'objet.<< Dans
le fond, les objets seront fabriqués de façon à respecter
ce qui est demandé dans le label, avec les mêmes critères uniques>>;<< C'est mieux d'avoir quelque chose
de transversal, moi, je n'achète pas qu'un seul type
d'objet>>. Par ailleurs, la multiplication des labels est évoquée comme un risque de disqualifier et de diluer leur
légitimité (à l'image de ce qui se passe dans le domaine
Marketing culturel
alimentaire). Elle est également spontanément associée
à une politique de marque trop agressive, ce qui ne correspond pas à l'esprit de l'artisanat d'art. Concernant
les modalités d'attribution du label, les répondants identifient clairement plusieurs groupes susceptibles de
donner leur avis sur les 0bjets d'artisanat d'art, du plus
restrictif au moins restrictif. L'interprofession est désignée spontanément comine l'organisme pertinent pour
délivrer le label. Une ouvèrture au-delà de l'appréciation
de la simple technique est également souhaitée : « Faut
ouvrir, sinon les 」←イ。ュセウエ・@
soutiennent leurs collègues, parce qu'ils ont teS, mêmes fournisseurs»;<< Faut
une base, mais aussi def gens qui jugent autre chose
que la technique, qui Soient un peu plus ouverts».
Les critères de sélection 4.loivent rester ouverts : l'artisanat d'art n'est pas uniquelment une affaire de technique,
c'est aussi une question <;l'émotion, l'objet vraiment exceptionnel est justement ;celui qui bouscule les normes.
Interrogés sur les critèresique le label devrait comporter,
deux éléments sont mentîonnés :l'origine géographique
et le niveau d'excellencelvérifié par le processus de fabrication. La question de l'origine est une question très
importante pour les répondants, qui englobe elle-même
plusieurs sous-thèmes. L'origine désigne d'abord l'origine
très précise de l'atelier, du lieu de fabrication, à l'échelle
de la ville, voire de la région. Dans ce cas, on attend de
pouvoir situer très exactement l'emplacement du lieu
de création, comme si l'on pouvait s'y rendre. «j'aime
bien connaître le nom et l'adresse de l'atelier: on se
dit que l'on pourrait passer le voir, c'est pas n'importe
où» ; << Ca permet de retrouver l'artisan>>. À un second
niveau, l'origine peut également désigner le terroir ou
le pays au sens de la région :c'est un ensemble géographique plus large, qui marque l'attachement de l'objet à
une tradition, un savoir- faire local. <<]epense à un service
à thé du pays basque, c'est décoré selon un motif spécifique du pays basque. C'est important d'avoir un régionalisme au niveau des objets>>. Concernant le niveau
d'excellence garantie par le label, il faut faire attention
cependant à ne pas dévaloriser les objets sans label : << Ca
veut dire que les artisans d'art qui n'ont pas le label,
ils sont moins bien? je ne suis pas d'accord>>. Si les participants perçoivent clairement une différence entre les
objets d'artisanat et les objets d'artisanat d'art, plus raffinés, plus travaillés, plus élaborés, ils ont en revanche du
mal à établir des distinctions au sein de l'artisanat d'art
et n'imaginent pas que certains objets produits par des
artisans d'art puissent être de << mauvaise qualité >>.Par
ailleurs, les répondants précisent bien que l'excellence
doit avant tout désigner l'excellence du métier et du
savoir-faire, et non celle de l'objet lui-même, en particulier ses qualités esthétiques.<< Dans le label, faut qu'il y
ait la garantie que c'est un professionnel qui maîtrise
une technique >> ; << On ne lui donne que s'il respecte
des critères sur les matériaux utilisés.. . >> ; << Pour moi
l'artisanat d'art c'est une pièce unique, il faut pouvoir
prouver que le produit a été fait à la main >>.Si le label semble répondre au besoin de réassurance des participants des tables rondes, un autre élément est évoqué
spontanément :il s'agit de la visite de l'atelier d'art.
• L'atelier d'art
Selon la mythologie grecque, l'artisan a un secret, il a
quelque chose à cacher. Il garde farouchement le mystère de la création. Les artisans se doivent donc de s'isoler pour pouvoir travailler à l'abri des regards :lieu reculé, caverne, grotte ... Les artisans vivent souvent dans
des endroits mystérieux et sombres. Pour les Grecs, le
Dieu du feu, des forges et des volcans, Héphaïstos, a ainsi
vécu pendant neuf ans, à l'insu de tous, dans une grotte
de l'île de Lemnos, où il fait son apprentissage d'artisan
en façonnant des bijoux. Il y a donc autour de l'artiste
un imaginaire du secret, un principe d'interdit, un pouvoir mystérieux et dangereux. L'atelier propose donc un
voyage au cours duquel le voyageur va entrer sous terre,
sous la surface, dans la caverne de l'artiste pour aller y
découvrir quelque chose qui lui est normalement invisible.
Ainsi, l'atelier est un espace imaginaire, central de la
relation à l'objet : c'est le point de référence absolu
et les répondants prennent plaisir à raconter leurs visites d'ateliers. L'atelier est perçu comme un espace de
résistance du savoir-faire face à la grande industrie. Il
est la garantie ultime d'authenticité de l'objet :acheter
l'objet en âfelier revient à puiser à la source même de
l'objet.« {:&,mieux c'est quand même de voir l'artisan,
au ュ。ゥョセ@
'on est sûr d'où ça vient>>. L'atelier confère
ainsi à l'objet toute une série de valeurs symboliques et
dynamiques que l'acheteur emporte avec lui : la compréhension du processus de fabrication, l'ambiance de
l'atelier, le rapport à l'artiste, etc.« Quand je suis dans
l'atelier, j'ai l'impression d'avoir connaissance de la
création de l'objet :j'ai une idée de processus de fabrication>>. L'atelier est une unité de lieu où l'on imagine
que l'essentiel du travail est accompli :les participants
des tables rondes apprécieraient d'avoir même une traçabilité de l'objet, pour savoir ce qui est effectué et à
quel endroit. « En même temps, il y a des bois précieux
qui sont importés en France, tout ne peut pas être fait
au même endroit et c'est pas non plus le menuisier
qui fait les ferronneries >> ; << Il faut une traçabilité de
l'objet pour qu'on puisse suivre où l'objet a été fait>>.
Ainsi les tables rondes ont permis de faire émerger
deux éléments intéressants pouvant jouer un rôle de
réassurance pour les acheteurs d'art et d'artisanat d'art :
le label et l'atelier d'art. Ces deux éléments n'assurent
cependant pas la même fonction dans la relation entre
le créateur et le client. Aussi, la partie suivante analyse
ces deux éléments afin de déterminer quelles formes ils
pourraient prendre et quelles fonctions ils pourraient
remplir au sein de cette relation.
Les enieux des labels et ateliers
d'art dans la relation acheteurcréateur
Les labels connaissent aujourd'hui un engouement
particulier, ils sont présents partout, des produits de
Décisions Marketing W65 Janvier-Mars 2012 - 15
L'art et l'artisanat d'art en quête de réassurance
consommation courante aux services. Ceci met en danger leur efficacité: trop de labels peut tuer le label. C'est
pourquoi il est fondamental d'analyser les différentes
formes que les labels peuvent prendre afin d'envisager
le type de label le plus adapté à la spécificité de la relation acheteur-créateur dans le domaine de l'art. Ces
analyses sont présentées en première partie. La seconde
partie se consacrera à la visite d'atelier d'art et analysera
son rôle dans la relation acheteur-créateur.
Le principe du label
Le principe du label assurant l'authenticité des ob-
jets pose en ce qui concerne l'art un certain nombre
d'interrogations. En effet, si l'objet d'artisanat d'art peut
être labellisé selon un processus de fabrication déterminé, cela semble plus délicat à mettre en œuvre pour
un produit tel que l'œuvre d'art. Sur le plan théorique,
le label peut toutefois être rapproché du concept de
marque, en étant défini comme<< une marque particulière qui n'émane pas d'une entreprise productrice mais
utilisable par elle>> (12). Or, la marque constitue un fort
élément d'identification du produit en lui conférant une
certaine personnalité et des valeurs appropriées. Définie par un nom, un terme, un signe, un symbole, un dessin, ou toute combinaison de ces éléments, cette marque
peut correspondre dans notre contexte de recherche,
à la signature de l'artiste, garantie de l'authenticité et
de l'unicité de l'objet. Elément de réassurance chez le
consommateur, ce type de marque existe, en effet, dans
le domaine culturel depuis fort longtemps puisque l'effet-signature de l'artiste est bien antérieur à la création
de marques de produits et services tels que nous les
connaissons aujourd'hui.
Le sujet devient néanmoins plus complexe pour la
marque collective. Il faut, en effet, distinguer la marque
produit qui correspond à la marque d'artiste dont nous
avons parlé auparavant et qui découle de l'effet signature très puissant (par exemple, les artistes Picasso ou
Ben arrivant à atteindre des ventes record mais aussi
à faire commercialiser d'autres produits plus courants
sous leur seul nom8 ) de la marque ombrelle regroupant
d'autres marques (par exemple, des lieux très connus
comme les National Gallery) ou les labels en tout
genre (comme le classement au patrimoine mondial
de l'Unesco ou les capitales européennes de la culture)
venant renforcer cet effet-marque (5). Deux types de
labels peuvent être distingués (12) :les labels expérientiels donnant une information sur l'expérience de
consommation du produit fondé sur le jugement et l'appréciation d'autrui et les labels techniques renvoyant
à des caractéristiques intrinsèques du produit. Les labels
expérientiels s'appliquent parfaitement aux produits
culturels, en raison de leur nature même, basée sur l'expérience vécue et ressentie (12).
L'approche de la marque ombrelle peut donc présenter
pour l'art contemporain deux axes de développement
pertinents :
• la marque collective, regroupement d'artistes ou de
16- Virginie De BARNIER et Joëlle LAGIER
créateurs animés par les mêmes intentions ;
• la création de labels culturels ou expérientiels, tels
que définis précédemment.
En termes de concrétisation de ces propositions, le
concept de marque collective fait déjà partie de l'actualité. Sans rappeler le succès enregistrés par les mouvements artistiques des années 60 ou 70 comme le Pop
Art, Flu:x:us ou le Land Art, unis par la cohésion de
leur discours et de leur propos, il suffit de citer à titre
d'exemple le collectif <<Faile>> reconnu dans le milieu
de l'art contemporain newyorkais comme pionnier du
Street Art et apposant avec succès une signature unique
et collective sur toutes ses créations. Le concept de label culturel ou expérientiel semble, en revanche, plus
délicat à opérationnaliser en raison d'une part des critères de choix et de sélection des artistes, d'autre part
des structures et organisations à mettre en place. Cependant, ceci ne remet pas en question son intérêt, dans la
mesure où il permet d'influencer trois variables médiatrices de l'intention d'achat: la qualité, l'unicité perçue,
l'estime accordée au créateur (12). La création de labels
expérientiels pourrait, en effet, permettre de revaloriser
l'image de l'art contemporain vis-à-vis d'un public en
quête de repères.
Ainsi deux grands types de labels peuvent être créés :
des labels-experts émanant des pouvoirs publics ou
d'organismes indépendants et des labels-consommateurs émanant d'organismes indépendants ou de
distributeurs (12). La création de nouveaux labels d'art
pourrait ainsi s'apparenter à des labels-experts ou des
labels-consommateurs et prendre différentes formes.
Les labels experts pourraient ainsi :
• se rapprocher des prix comme le prix Thrner (Turner Prize) organisé par la Tate Britain à Londres, mais
avec une plus grande ouverture internationale (le prix
Turner reste, en effet, très anglo-saxon) et des souscatégories culturelles plus explicites (comme par
exemple la peinture, la sculpture, l'art audiovisuel. .. )
• et proposer, par exemple, dans ce contexte, le Grand
Prix du Meilleur Artiste, à l'image des césars ou des
oscars dans le milieu cinématographique.
La création de labels-consommateurs, supportés par des
organismes extérieurs ou des distributeurs d'œuvres
d'art (galeries, maisons de vente aux enchères ... ) peut
également constituer une recommandation intéressante.
Dans le domaine cinématographique, le distributeur
UGC interroge ainsi des spectateurs en avant-première
dans le cadre du « Grand Jury des spectateurs UGC >> et
octroie un label aux films dont le taux de satisfaction est
le plus élevé. Selon le même principe, un label Saatchi,
un label Sotheby ou Christie's pourrait être créé, label
qui serait le garant de la qualité des meilleures œuvres
du marché, dans le respect d'une totale transparence de
l'information.
Ce concept de label expérientiel pourrait aussi évoluer
vers des labels de co-production ou de co-créativité
puisqu'à la source de certaines œuvres se trouvent de
Marketing culturel
Encadré 3 : Le triomphe du marketing artistique
L'art contemporain voit émerger des artistes qui n'hésitent pas à effectuer une rupture entre intention artistique et réalisation. Plusieurs artistes limitent leur travail à l'intention artistique, délégant la réalisation à des ateliers.
L'artiste américain Jeff Koons fait réaliser ses œuvres dans un atelier situé à Chelsea près de New York où plus de 100
assistants travaillent pour lui. Pour les peintures, il procède à des créations assistées par ordinateur et ce sont ses assistants
qui les mettent en forme sur toile. Dans le courant de la démocratisation de l'art, Kaons explique qu'il fait de l'art pour
le plus grand nombre セエ@ s'approprie des objets du quotidien avec lesquels tout le monde peut créer un lien (aspirateurs,
ustensiles électroménagers, bibelots rococo, lapins gonflables, bergères ou petits cochons en sucre, Michael Jackson en
porcelaine, jouets ... ). Kaons abolit ainsi dans ses créations les frontières entre art élitiste et art populaire.
Dans la même lignée, Aセ。イエゥウ・@
anglais Damien Hirst est actuellement l'artiste le plus riche du monde. Ses œuvres les plus
connues sont « For the 'Love of God » , une réplique en platine du crâne d'un homme décédé au XVIII• siècle, incrustée
de 8601 diamants et cédée en août 2007 pour 100 millions de dollars, ou encore« Lullaby Spring », une armoire à
pharmacie métallique contenant 6136 pilules faites à la main et peintes individuellement, œuvre vendue 19,2 millions de
dollars. Les critiques カゥセ¢Mウ@
de Damien Hirst portent sur trois points principaux : le caractère périssable de ses œuvres,
leur caractère industrieF voire commercial (réalisées par plus de 120 assistants dans des ateliers), et l'organisation capitaliste de l'artiste (la créaijon de la société« Science Ltd »qui regroupe ses diverses activités: ventes d'images sous licences,
vente de produits sur Internet, publication de reproductions, livres, posters, tee-shirts et autres objets en tout genre).
véritables ateliers et artisans d'art (encadré 3 sur Jeff
Koons et Damien Hirst mettant en œuvre ces pratiques).
Cela pourrait, en effet, redonner confiance au consommateur en termes de qualité et d'excellence mais également en termes d'échange et de relation. Label et atelier
d'art peuvent enfin trouver des synergies intéressantes.
En effet, le label permet d'évaluer le niveau d'excellence
du processus de fabrication, répondant aux critères les
plus sélectifs. Il peut mentionner l'origine géographique
de l'objet, voire même préciser très exactement sa provenance. Le principe de valider la fabrication de l'objet
au sein de l'atelier d'art pourrait constituer une source
de crédibilité supplémentaire pour ce type de label dans
la mesure où il contiendrait à la fois la dimension de l'origine (par la localisation) et la dimension d'excellence.
Le principe de la visite d'atelier
Le principe de la visite de l'atelier d'art semble éga-
lement constituer, de son côté, une solution intéressante
pour le marketing de l'art dans la mesure où il permet
au consommateur de se rapprocher du créateur, de partager ses émotions et de s'ouvrir à son univers en toute
simplicité et discrétion. Il permettrait notamment de
diminuer la distance psychologique perçue entre l'artiste et l'acheteur, tel que le recommande De Benedetti
(6), et de cristalliser la relation établie entre les deux. A
l'instar des grands restaurants qui exposent les cuisines
derrière de grandes baies vitrées afin de permettre aux
clients d'assister à la création des plats, la visite d'atelier
permettrait de voir l'artiste en action. Ainsi, fini le passage obligé des galeries d'art ou l'itinéraire compliqué
des ventes aux enchères, réservé aux moins timides ou
aux plus initiés. Quelques artistes proposent d'ailleurs
depuis quelques années, des «Ateliers portes ouvertes>>,
à travers toute l'Europe, et le public reste extrêmement
friand de ce type d'événement, en manifestant sa satisfaction de ne rencontrer que le créateur sans avoir
affaire à des intermédiaires supplémentaires. D'autres
tels que Jeff Koons offrent des visites d'ateliers privées
et personnalisées, dont le prix est mis aux enchères
sur internet. Ces visites permettent au consommateur
、G←」ィ。ョァ・ゥセカ@
le créateur, au point même parfois de le
vers de nouvelles idées ou des commandes
faire ←カッャーNセイ@
personnalisées.
Source de transfert et de partage,l'atelier d'art constitue,
en effet, un point de rencontre intime et original. Il peut
notamment rassurer le consommateur sur l'authenticité
du produit et de l'expérience vécue (3). Il peut jouer un
rôle essentiel dans la création d'expérience culturelle
(14) dans la mesure où il représente pour le consommateur un lieu d'exposition convivial et attrayant. Son habillage, son design, son esthétisme peuvent déclencher
des émotions autres que celles engendrées par l'objet
d'art exposé. Et l'interaction lieu-individu-objet devient,
dans cette nouvelle mise en perspective, un point central de réflexion se rapprochant des recherches déjà menées sur la mise en scène des lieux culturels. Puhl (16)
observe ainsi que les lieux culturels intègrent de plus en
plus les approches sensorielles. Le visiteur doit devenir
l'acteur-créateur de sa propre expérience qui devient
unique et personnelle. Jouer le rôle de lien social constitue une des caractéristiques de ces actions en créant
des espaces d'interaction inédits et informels. Créer un
habillage sensoriel du lieu ou de l'objet représente une
autre façon de créer la relation. Dans ce cadre, Joy et
Sherry (9) préconisent l'expérience immersive et nous
amènent à penser que toute action mettant en valeur la
participation même du consommateur est à recommander, comme par exemple la mise en place de parcours de
découverte particuliers, la mise en œuvre de créations
ou pourquoi pas de co-créations avec l'artiste même.
La valeur de l'œuvre d'art n'est ainsi plus simplement
extrinsèque, elle acquiert une dimension intrinsèque
(orientée vers soi) et active (l'individu s'engage concrètement dans la découverte de l'objet et de l'univers de
son créateur) selon la typologie de Holbrook (10) 9 • La
Décisions Marketing N°65 Janvier-Mars 2012- 17
L'art et l'artisanat d'art en quête de réassurance
visite d'atelier permet ainsi le passage d'une valeur réactive et extrinsèque(« l'excellence») à une valeur active
et intrinsèque (« le jeu >>) (10). Mancarelli (14) soulève,
de son côté, la question de la conception même du lieu
de création et de diffusion, en citant deux cas :le cas de
lieux d'exposition s'appuyant sur le positionnement recherché pour les œuvres ou le cas de lieux en décalage
complet avec les créations présentées, pour lesquels
les règles habituelles de l'utilisation de l'espace ont été
modifiées. La sortie culturelle, et dans ce sens la visite
d'atelier, peut en effet présenter des aspects récréatifs et
divertissants, venant rompre avec le quotidien et créer
une nouvelle vision de l'art expérientielle, basée sur les
principes de l'échange et de l'interactivité. Très valorisant et recherché par le consommateur, ce principe de
visite d'atelier peut ainsi prendre de multiples formes et
évoluer vers de nouvelles stratégies en termes de prix,
de circuit de distribution et de communication. En particulier le marketing mix classique peut être revisité à la
lumière de l'influence du monde des nouvelles technologies. L'artiste peut devenir proche du consommateur,
par l'intermédiaire de sites personnels, de blogs, de visites de galeries, voire même d'expositions virtuelles. Second life, par exemple, offre aux internautes une rétrospective des œuvres de Adam Ramona, artiste australien
réputé pour son utilisation des médias numériques, une
exposition de la Tournicoton Art Gallery et la visite de
l'île Moya, où l'artiste Patrick Moya présente plusieurs
musées consacrés à ses œuvres.
Implications managériales et
conclusion
Les résultats issus de ces études qualitatives montrent
que la relation acheteur-créateur dans le domaine de
l'art est une relation spécifique et complexe, qu'il est
important de comprendre afin de faciliter les échanges.
Les acheteurs d'art et d'artisanat d'art ont concrètement
besoin d'être rassurés sur quatre éléments clés :la qualité
et l'excellence de l'objet, son originalité, son esthétisme
et son unicité. Les acheteurs d'artisanat d'art attendent
également un objet à l'aspect manuel qui fait bien ressortir le travail de la matière tandis que les acheteurs d'art
manifestent plutôt un besoin d'émotions: ils veulent ressentir des sensations fortes dans la relation à l'objet. Le
défi des professionnels du marché de l'art consiste donc
à allier cognition et émotion, raison et passion. Dans ce
contexte, le label et la visite d'atelier présentent des opportunités intéressantes, le premier apportant une dimension rationnelle à l'achat, le second une dimension
plus émotionnelle. Ces deux éléments sont par ailleurs
complémentaires et ne remplissent pas la même fonction,
concourant à rassurer l'acheteur tant sur le plan cognitif
et affectif. Que ce soit la création de nouvelles marques
ou de nouveaux labels, l'invention de nouveaux types de
visite culturelle, ces préconisations soulignent, en fait, le
besoin imminent de réassurance du consommateur, qui
ne veut plus simplement acheter un objet mais souhaite
désormais comprendre, partager une expérience.
18- Virginie De BARNIER et Joëlle LAGIER
La force de cette expérience basée sur l'originalité et
l'authenticité peut être transmise à la fois par le mode
de création de l'objet (validé par un label) et le type de
relation établie entre le créateur et l'acheteur (confirmé
par une visite d'atelier).Valorisée par un certain nombre
de signes et symboles (2), l'expérience issue de la relation acheteur-créateur constitue en effet pour l'individu en quête de repères un élément moteur de son
comportement. L'évaluation de cette expérience relève
d'un caractère à la fois ponctuel (satisfaction) et relationnel en s'appuyant sur le concept même de valeur.
Or, ce concept de valeur a évolué à travers le temps.
Exprimée initialement dans le cadre d'une simple transaction centrée sur les bénéficies utilitaires et fonctionnels de l'objet, elle s'est progressivement orientée,
dans le domaine culturel, vers la valeur de l'usage et
de consommation. La valeur ne relève plus alors de la
décision d'achat elle-même mais représente la conséquence d'expériences cumulées. Elle constitue une réponse affective du consommateur à l'égard de l'objet et
n'est plus le résultat d'un calcul rationnel mais le produit d'une expérience (7). Plusieurs études ont ainsi été
menées afin d'appréhender le concept de valeur expérientielle (16, 1). Ces travaux ont notamment souligné la
difficulté d'établir une valeur réelle de la consommation
culturelle, dans le sens où cette consommation relève
d'une dimension hédoniste et symbolique prononcée.
Ces constats nous permettent d'exprimer deux types
de préconisations aux différents acteurs de l'art. La
première consiste à relativiser les barrières existantes
vis-à-vis de la commercialisation de l'art, activité parfois
considérée comme critiquable, dégradante et bassement
mercantile. Un article récent paru dans l'Expansion en
juillet 2009 sur<< le business de l'art>>, aux côtés d'entreprises plus anciennes comme Bazart, soutient cette idée
en proposant << cinq techniques pour acheter malin »,
dont notamment << consommer comme au supermarché» en citant le succès du salon d'art contemporain
Art Shopping du Carrousel du Louvre. Dans la lignée
de cette première préconisation, une seconde préconisation est d'accompagner cette démarche novatrice en
continuant à construire une offre claire et adaptée aux
changements des pratiques culturelles. L'enjeu est le
passage d'une approche transactionnelle de l'échange
entre l'artiste et l'acheteur d'art à une approche relationnelle, permettant de créer de la valeur. Il s'agit de
mettre en avant non plus l'objet d'art lui-même, mais la
relation que le consommateur établit avec cet objet et
son créateur, ainsi que le plaisir de l'expérience et de
l'échange créé. Les principes de réenchantement, dans
un monde en plein changement, répondent, en effet, au
besoin de l'individu de donner du sens à sa consommation, à son achat d'objet d'art.
Notes
•
1 Source : Artprice 2010.
2 Cet indice utilise les fondements théoriques du Michigan
Consumer Sentiment Index du Survey Research Center de
Marketing culturel
l'université du Michigan qui fait référence sur les places de
marché mondiales.
3 Source: Tendances du marché de l'art 2009, Artprice.
4 Les matériaux listés sont : bois, cuir, métal, pierre, terre,
textile, verre. Les activités référencées sont : art floral, arts
du spectacle, arts et エイ。、ゥセッョウ@
populaires, arts graphiques,
arts mécaniques, jeux, j:ouets, bijouterie-joaillerie-orfèvrerie-horlogerie, décoration, facture instrumentale, luminaires, métiers liés à l'architecture, mode, tabletterie.
l
5 Voir site : ィエーZOキN。セャゥ・イウ、」ッュ@
6 Source : http://www.cillture.gouv.fr/mcc/Actualites/Ala-une!Les-metiers-d-art-al-l-honneur-dans-les-vitrines-du:
Ministere
!
7 Source : Les métiers d'art, d'excellence et du luxe et les
savoir-faire traditionnels :'L'avenir entre nos mains, Rapport à Monsieur le Premier ministre de Madame Catherine
Dumas, Sénatrice de Paris, septembre 2009.
8 Ben commercialise par exemple toute une gamme de produits de bureau : trousses, stylos, cahiers, agendas ...
9 La typologie de la valeur proposée par Holbrook (1999)
fait apparaître huit composantes (efficacité, excellence, jeu,
esthétique, statut, estime, éthique et spiritualité) selon trois
dimensions (orienté vers soi ou les autres, extrinsèque ou
intrinsèque et active ou réactive).
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consommation d'activités de consommations culturelles :
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