Insee PremièreUn travailleur indépendant sur cinq dépend économiquement d’une autre entité

Damien Babet, division Emploi, Insee

En 2017, en France, sur 3,1 millions d’indépendants, un sur cinq est économiquement dépendant d’une relation avec un client, une organisation en amont ou un intermédiaire. Ces relations de dépendance imposent des contraintes : elles limitent l’autonomie quant au contenu des tâches, aux horaires et à la fixation des prix.

La dépendance à un client est la première forme de dépendance : elle concerne 10 % des indépendants. Plus nombreux dans l’information-communication, les transports et les services aux entreprises, ils sont à la fois contraints sur leurs horaires et en manque de travail.

Les dépendants d’une relation amont, 7 % des indépendants, sont pour moitié des agriculteurs et pour un cinquième dans le commerce. Ils sont plus souvent employeurs, en société, avec des associés ou insérés dans des réseaux. Ils sont moins diplômés. Ils travaillent davantage que les autres. Pour un quart d’entre eux, le manque d’influence sur leurs prix est la difficulté principale.

Les dépendants d’un intermédiaire (y compris d’une plateforme numérique) représentent 4 % des indépendants. Ils sont plus présents dans les secteurs du transport, de l’immobilier et de l’information-communication. En moyenne, ils travaillent moins que les autres et sont bien plus nombreux à souhaiter travailler davantage. Un sur cinq se déclare inscrit à Pôle emploi, ce qui reflète à la fois la volonté de changer d’emploi et une sortie récente du chômage pour certains d’entre eux.

Damien Babet, division Emploi, Insee
Insee Première No 1748- Avril 2019

Un indépendant sur dix dépend économiquement d’un client unique ou dominant

En 2017, en France hors Mayotte, 3,1 millions de personnes, soit 11,5 % des personnes se considèrent comme (figure 1). Elles se déclarent à leur compte ou salarié-chef d’entreprise, gérant mandataire ou président-directeur général (PDG) dans le cadre de leur emploi principal. Parmi elles, 920 000 personnes, soit 30 % des indépendants, exercent leur activité en étant soumises à une relation dominante avec une autre entité économique, qu’il s’agisse d’un client, d’une relation amont ou d’un intermédiaire. Un client ou une relation amont (groupement, centrale d’achat ou coopérative, franchise, licence de marque, location-gérance, etc.) est dit dominant s’il représente au moins 75 % des revenus sur les 12 derniers mois. Un intermédiaire (par exemple une plateforme numérique) est dit dominant s’il est cité parmi les principaux modes d’entrée en contact avec la clientèle.

Parmi ces indépendants avec une relation dominante, 620 000, soit 20 % des indépendants, sont  : ils anticipent des difficultés importantes pouvant mettre en danger la survie de leur entreprise en cas de rupture de cette relation (pour ceux ayant un dominant ou engagés dans une dominante), ou ne citent aucun autre mode d’accès à la clientèle (pour ceux recourant à un ).

La dépendance économique à un client exclusivement concerne 10 % des indépendants ; c’est la forme de dépendance la plus fréquente. 7 % des indépendants dépendent d’une relation amont et 4 % dépendent d’un intermédiaire.

Figure 1 - Indépendants ayant des relations dominantes ou de dépendance

Figure 1 - Indépendants ayant des relations dominantes ou de dépendance - Lecture : 619 000 indépendants sont dans une relation de dépendance, soit 20 % des indépendants et 2,3 % des personnes en emploi. Parmi eux, 295 000 sont dépendants d'un client uniquement.
Effectifs (en milliers) Part parmi les indépendants (en %) Part parmi les personnes en emploi (en %)
Indépendants 3 103 100 11,5
Ayant une relation dominante¹ 916 30 3,4
   Dépendance à cette relation² : 619 20 2,3
Dépendance à un client 295 10 1,1
Dépendance à une relation amont 203 7 0,8
Dépendance à un intermédiaire 121 4 0,5
Ensemble des personnes en emploi 26 880 100,0
  • Note : les sommes peuvent être légèrement inexactes en raison des arrondis.
  • 1. Client ou relation amont représentant au moins 75 % du revenu, ou intermédiaire parmi les principaux modes d’accès aux clients.
  • 2. Client ou relation amont dominant dont la perte entraînerait des difficultés importantes pour poursuivre l’activité, ou intermédiaire comme unique mode d’accès aux clients.
  • Lecture : 619 000 indépendants sont dans une relation de dépendance, soit 20 % des indépendants et 2,3 % des personnes en emploi. Parmi eux, 295 000 sont dépendants d'un client uniquement.
  • Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2017 et module complémentaire sur les formes de travail indépendant.

Dépendance économique et dépendance organisationnelle vont de pair

Plus le client principal pèse dans leurs revenus, plus les indépendants anticipent des difficultés importantes s’ils venaient à le perdre. C’est le cas de plus des deux tiers des indépendants dont le poids du client principal dépasse 75 % de leur revenu, contre moins de la moitié de ceux dont il représente entre 50 % et 75 % du revenu (figure 2). En outre, plus le client principal pèse dans l’activité, plus il exerce de contraintes sur l’organisation du travail : 19 % des indépendants qui ont travaillé pour un unique client au cours des 12 derniers mois déclarent que le client détermine leurs heures de début et de fin de travail, contre 8 % des indépendants dont le client principal représente moins de la moitié des revenus des 12 derniers mois.

La dépendance économique va aussi de pair avec la dépendance organisationnelle dans le cas des relations amont. Interrogés sur les obligations qui découlent de relations amonts dominantes, les indépendants concernés en citent tous au moins une. Ils mettent plus souvent en avant des contraintes sur les prix ou les tarifs (pour 76 % d’entre eux) que sur le choix des fournisseurs, sur le choix des produits ou services ou encore sur la détermination des horaires (56 % citent au moins l’une de ces trois contraintes). 68 % des indépendants ayant une relation amont dominante anticipent des difficultés importantes en cas de rupture de cette relation. Cette part s’élève à 75 % lorsque la relation amont impose des obligations sur les prix. Elle atteint 85 % lorsque se cumulent une obligation sur les prix et une obligation sur le choix des fournisseurs, le choix des produits ou la détermination des horaires.

Figure 2 - Autonomie des indépendants en fonction du poids du principal client

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Figure 2 - Autonomie des indépendants en fonction du poids du principal client (en %) - Lecture : parmi les indépendants n’ayant qu’un seul client, 68 % anticipent des difficultés importantes en cas de perte de ce client.
Client unique Client représentant 75 % ou plus du revenu Client représentant entre 50 % et 75 % du revenu Client représentant moins de 50 % du revenu Ensemble des indépendants
La perte du client principal entraînerait des difficultés importantes 68 71 45 /// ///
Le ou les clients décident des horaires de début et de fin de travail 19 13 11 8 9
Ne décide pas soi-même du contenu des tâches 16 11 9 8 9
Ne décide pas soi-même de l’ordre de ses tâches 10 10 9 8 8
Part parmi les indépendants (en %) 6 13 11 70 100
  • Note : la question sur les conséquences de la perte du client principal n’a pas été posée lorsque sa part n’excède pas 50 % du revenu.
  • Lecture : parmi les indépendants n’ayant qu’un seul client, 68 % anticipent des difficultés importantes en cas de perte de ce client.
  • Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi se déclarant indépendants.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2017 et module complémentaire sur les formes de travail indépendant.

Figure 2 - Autonomie des indépendants en fonction du poids du principal client

  • Note : la question sur les conséquences de la perte du client principal n’a pas été posée lorsque sa part n’excède pas 50 % du revenu.
  • Lecture : parmi les indépendants n’ayant qu’un seul client, 68 % anticipent des difficultés importantes en cas de perte de ce client.
  • Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi se déclarant indépendants.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2017 et module complémentaire sur les formes de travail indépendant.

Une clientèle plus souvent constituée d’entreprises ou d’administrations

Les indépendants économiquement dépendants n’ont pas le même type de clientèle que les autres. Ils s’adressent davantage à des entreprises (48 % contre 32 % pour l’ensemble des indépendants) et deux fois plus souvent à des administrations (11 % contre 6 %). En contrepartie, ils vendent moins souvent leurs biens ou services à des particuliers (41 % contre 61 %).

En revanche, la dépendance économique dans son ensemble apparaît peu liée au statut de l’entreprise (constituée en société, entreprise individuelle ou micro-entreprise) ou au fait d’être employeur (figure 3). Pour autant, les indépendants dépendant d’un client ou d’un intermédiaire ont plus souvent le statut de micro-entrepreneur (respectivement 28 % et 36 %, contre 23 % pour l’ensemble des indépendants) et sont moins souvent employeurs. Au contraire, les relations de dépendance amont concernent des indépendants plus insérés : ils sont plus souvent employeurs (40 % contre 35 % pour l’ensemble des indépendants), plus souvent en société (52 % contre 42 %), ont plus souvent des associés (40 % contre 25 %) et travaillent plus souvent en réseau (38 % contre 27 %).

Figure 3 - Caractéristiques des emplois des indépendants selon leur dépendance

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Figure 3 - Caractéristiques des emplois des indépendants selon leur dépendance (en %) - Lecture : 6 % des indépendants ont pour principale clientèle des administrations, des organismes publics ou parapublics ou des associations. Cette part s’élève à 13 % parmi ceux qui sont dépendants de leur client principal.
Dépendance à un client Dépendance à une relation amont Dépendance à un intermédiaire Ensemble des indépendants en dépendance d'une relation Ensemble des indépendants
Principal type de clientèle
Administrations, organismes publics/parapublics ou associations 13 7 12 11 6
Entreprises ou comités d'entreprise 47 56 37 48 32
Particuliers 40 36 51 41 61
Société
En société 39 52 38 43 42
Micro-entreprise 28 7 36 23 23
Ni société ni micro-entreprise 32 40 26 34 35
Employeur 27 40 28 32 35
Travaille :
- avec un ou plusieurs associés 14 40 25 25 25
- en réseau avec d'autres indépendants 15 38 42 28 27
  • Lecture : 6 % des indépendants ont pour principale clientèle des administrations, des organismes publics ou parapublics ou des associations. Cette part s’élève à 13 % parmi ceux qui sont dépendants de leur client principal.
  • Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi se déclarant indépendants.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2017 et module complémentaire sur les formes de travail indépendant.

Un agriculteur sur quatre dépend d’une relation amont

La dépendance économique des indépendants est relativement rare dans le commerce, la construction, les services aux ménages ou l'administration, l'enseignement et la santé (moins de 15 % des cas ; figure 4). Elle est en revanche plus fréquente dans l’agriculture où elle concerne 41 % des indépendants.

Les trois sources de dépendance (client, relation amont et intermédiaire) pèsent différemment selon le secteur d’activité. La dépendance à un intermédiaire est inexistante dans le commerce, où la dépendance à une relation amont est surreprésentée (9 %). La dépendance à une relation amont est plus importante encore dans l’agriculture (26 %, via notamment les coopératives) et les services financiers (17 %). Le recours exclusif à un intermédiaire pour accéder aux clients (ce qui inclut les plateformes numériques) est plus répandu dans les transports (16 %), l’immobilier (10 %) et l’information-communication (9 %). La dépendance à un client est quant à elle plus fréquente dans l’information-communication (24 %), les transports (17 %) et les services aux entreprises (15 %).

Figure 4 - Relations de dépendance selon le secteur d’activité

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Figure 4 - Relations de dépendance selon le secteur d’activité (en %) - Lecture : 26 % des indépendants dans le secteur de l’agriculture sont dépendants d’une relation amont.
Aucune dépendance Dépendance à un client Dépendance à une relation amont Dépendance à un intermédiaire
Agriculture 58,7 11,6 25,7 4,0
Transports 62,1 16,8 5,2 15,8
Information-communication 65,8 23,7 1,6 8,9
Services immobiliers 75,1 9,0 6,3 9,6
Services financiers 77,5 3,6 16,9 2,0
Services aux entreprises 78,1 15,0 2,7 4,2
Hébergement-restauration 83,5 9,8 5,1 1,5
Industrie 84,1 10,1 2,4 3,4
Commerce 85,2 5,3 9,1 0,4
Administration, enseignement, santé 86,5 7,1 0,7 5,8
Services aux ménages 87,3 7,0 3,0 2,6
Construction 89,7 5,8 0,9 3,6
Ensemble 80,1 9,5 6,5 3,9
  • Lecture : 26 % des indépendants dans le secteur de l’agriculture sont dépendants d’une relation amont.
  • Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi se déclarant indépendants.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2017 et module complémentaire sur les formes de travail indépendant.

Figure 4 - Relations de dépendance selon le secteur d’activité

  • Lecture : 26 % des indépendants dans le secteur de l’agriculture sont dépendants d’une relation amont.
  • Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi se déclarant indépendants.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2017 et module complémentaire sur les formes de travail indépendant.

Dans leur ensemble, s’agissant de leurs caractéristiques sociodémographiques, les indépendants économiquement dépendants ressemblent aux autres indépendants et diffèrent des salariés : ils sont plus âgés que ces derniers, plus diplômés, plus souvent des hommes et habitent plus souvent dans des communes rurales (figure 5). Ces caractéristiques varient en revanche selon le secteur d’activité et selon les formes de dépendance. Ainsi, les dépendants d’une relation amont, dont la moitié travaillent dans l’agriculture, habitent plus souvent une commune rurale que l’ensemble des indépendants, sont moins diplômés, plus âgés et sont des hommes pour les trois quarts d’entre eux. Les dépendants d’un client habitent plus souvent dans l’agglomération parisienne (20 % contre 14 % pour l’ensemble des indépendants), sont plus souvent immigrés ou descendants d’immigrés (23 % contre 18 %) et ont créé ou repris leur entreprise plus récemment : 21 % ont moins de 5 ans d’ancienneté contre 17 % pour l’ensemble des indépendants. Cette situation de dépendance peut ainsi dans certains cas traduire un manque de clients lié à un début d’activité. Les caractéristiques des dépendants d’un intermédiaire sont encore plus marquées : 22 % habitent l’agglomération parisienne, 30 % sont immigrés ou descendants d’immigrés et 26 % ont moins de 5 ans d’ancienneté. Ils sont aussi plus diplômés : 39 % possèdent un diplôme supérieur à Bac+2, contre 29 % des indépendants en général.

Figure 5 - Caractéristiques individuelles des indépendants selon leur dépendance

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Figure 5 - Caractéristiques individuelles des indépendants selon leur dépendance (en %) - Lecture : 34 % des indépendants sont des femmes, 66 % des hommes.
Indépendants Salariés
Dépendance à un client Dépendance à une relation amont Dépendance à un intermédiaire Ensemble des indépendants en dépendance d'une relation Ensemble des indépendants
Part des femmes 32 27 32 31 34 50
Âge
De 15 à 29 ans 9 6 6 8 7 20
De 30 à 49 ans 44 46 58 48 51 51
50 ans ou plus 46 48 36 45 41 29
Moins de 5 ans d'ancienneté 21 10 26 18 17 23
Niveau de diplôme
Supérieur à Bac+2 32 12 39 27 29 23
Bac+2 13 16 12 14 17 16
Bac 19 26 18 21 19 22
CAP, BEP 20 28 18 22 22 23
Aucun diplôme ou brevet 16 16 13 15 13 16
Immigré ou descendant d'immigré 23 10 30 20 18 19
Taille d’unité urbaine
Commune rurale 23 49 33 34 31 24
Unité urbaine (hors Paris) 57 41 45 49 55 58
Agglomération parisienne 20 10 22 17 14 18
  • Lecture : 34 % des indépendants sont des femmes, 66 % des hommes.
  • Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2017 et module complémentaire sur les formes de travail indépendant.

Les dépendants d’un intermédiaire sont plus nombreux à souhaiter travailler plus

Les indépendants économiquement dépendants sont nettement plus autonomes que les salariés, mais un peu moins que les autres indépendants (figure 6). En particulier, pour 19 % des dépendants d’un client, les horaires sont déterminés par le client, contre 9 % pour l’ensemble des indépendants. Les dépendants d’une relation amont souffrent davantage du manque d’influence sur les prix et tarifs (27 % le citent comme principale difficulté de l’année écoulée, contre 8 % pour l’ensemble des indépendants), conséquence directe des obligations sur les prix imposés par leur relation amont pour 83 % d’entre eux.

Les indépendants annoncent une s’élevant à 45 heures. Cette durée est plus élevée encore pour les dépendants d’une relation amont (54 heures), notamment parce qu’ils sont plus souvent agriculteurs et employeurs. Elle est bien moindre pour les dépendants d’un client (39 heures) et les dépendants d’un intermédiaire (38 heures), qui se rapprochent des salariés (36 heures en moyenne, temps plein et temps partiels confondus). Ces horaires plus réduits sont en partie subis : 15 % des dépendants d’un client et 24 % des dépendants d’un intermédiaire souhaitent davantage travailler, contre 13 % de l’ensemble des indépendants. Quand ils n’ont pas de salarié, 39 % des dépendants d’un client citent comme raison principale le manque de travail pour expliquer qu’ils n’embauchent pas, contre 32 % pour l’ensemble des indépendants. Les indépendants ont plus souvent des horaires de travail atypiques : 75 % ont travaillé le soir, la nuit ou le week-end au cours des trois derniers mois, contre 42 % des salariés. Cette part est moins élevée pour les dépendants d’un client (68 %) et les dépendants d’un intermédiaire (61 %).

Interrogés sur leur principale difficulté, 7 % des dépendants d’un intermédiaire citent le manque de revenu en cas de maladie (contre 4 % pour les indépendants en général) et 18 % des périodes de difficultés financières (contre 9 %). D'ailleurs, 42 % gagnent moins de 10 000 euros sur l’année, contre 31 % en moyenne parmi les indépendants, différence qui tient au moins en partie au moindre nombre d’heures travaillées. Cumulant plus souvent un second emploi en plus de leur activité principale d’indépendant, 14 % d’entre eux souhaitent un autre emploi, en plus ou à la place de l'actuel (contre 7 % des indépendants) et 20 % se déclarent inscrits à Pôle emploi (contre 6 % des indépendants). Cette proportion traduit un lien plus distendu avec l’emploi : 12 % disent qu’ils étaient au chômage un an auparavant, contre seulement 3 % des indépendants en général.

Figure 6 - Horaires, autonomie et souhait de changement des indépendants selon leur dépendance

en %
Figure 6 - Horaires, autonomie et souhait de changement des indépendants selon leur dépendance (en %) - Lecture : 19 % des indépendants travaillent habituellement moins de 35 heures par semaine.
Indépendants Salariés
Dépendance à un client Dépendance à une relation amont Dépendance à un intermédiaire Ensemble des indépendants en dépendance d'une relation Ensemble des indépendants
Heures habituellement travaillées par semaine
Moins de 35 heures 27 6 29 21 19 19
De 35 à moins de 50 heures 32 31 37 33 36 72
50 heures ou plus 39 62 33 46 44 7
Souhaite travailler plus d'heures* 15 5 24 14 13 19
Choix des horaires de travail
Le ou les clients décident des horaires 19 7 13 14 9 ///
Les horaires sont déterminés par un autre facteur 2 10 4 5 4 ///
Ne peut pas agir sur le contenu des tâches 11 11 15 12 9 38
Ne peut pas agir sur l’ordre des tâches 8 10 9 9 8 33
Principale difficulté : manque d'influence sur les prix 11 27 7 16 8 ///
Souhaite un autre emploi, en plus ou à la place de l'actuel 4 5 14 6 7 13
Se déclare inscrit à Pôle emploi 8 4 20 9 6 8
  • * Avec la variation du revenu correspondante.
  • Note : les questions sur le choix des horaires et la principale difficulté n’étaient posées qu’aux indépendants.
  • Lecture : 19 % des indépendants travaillent habituellement moins de 35 heures par semaine.
  • Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi.
  • Source : Insee, enquête Emploi 2017 et module complémentaire sur les formes de travail indépendant.

Les difficultés de mesure du phénomène de dépendance économique en Europe

En 2017, les indépendants représentent 11,5 % des personnes en emploi en France, contre 14,5 % dans l’Union européenne (UE). Cette part dépasse 20 % en Grèce et en Italie. En moyenne dans l’UE, 18 % des indépendants ont un client dominant (un seul client ou un client représentant au moins les trois quarts de leurs revenus). La proportion est la même en France ; elle est un peu moins élevée en Allemagne (15 %) ou en Espagne (13 %), mais est bien plus élevée au Royaume-Uni (29 %) ou en Suède (25 %). Parmi ces indépendants ayant un client dominant, 22 % déclarent qu’il détermine leurs horaires en moyenne dans l’UE, contre 15 % en France.

Au-delà de ces chiffres sur les clients dominants, les comparaisons européennes sont plus délicates. En effet, le questionnaire européen, moins riche que l’édition française, ne permet pas de mesurer la dépendance comme définie dans cette étude. Dans cette dernière, la notion de dépendance se limite à une approche économique (mesurée par les difficultés anticipées en cas de rupture de la relation) et retient un périmètre plus large des relations (en intégrant, au-delà des clients, les relations amont et le recours à un intermédiaire). La définition adoptée par Eurostat est très restrictive et ajoute notamment des critères organisationnels : sont dépendants au sens d’Eurostat les indépendants sans salarié, ayant un client dominant qui détermine leurs horaires de travail. Ainsi définis, les indépendants économiquement dépendant représentent 3 % des indépendants (2 % en France et 7 % au Royaume-Uni) et 0,5 % des personnes en emploi en Europe.

Sources

Le module complémentaire de l’enquête Emploi 2017 sur les formes de travail indépendant a été mené tout au long de l’année 2017 par l’Insee auprès des personnes en emploi, vivant en logement ordinaire en France hors Mayotte. Coordonné au niveau européen, le questionnaire comporte, en France, quelques questions additionnelles. Au total, 3 679 indépendants ont répondu au module. Les écarts commentés dans cette étude sont significatifs dans le cadre d’analyses toutes choses égales par ailleurs incluant notamment le secteur d'activité, la forme légale et le fait d'être employeur.

Définitions

Personne en emploi au sens du BIT : personne ayant effectué au moins une heure de travail rémunéré au cours de la semaine de référence, ou absente de son emploi sous certaines conditions de motif (congés annuels, maladie, maternité, etc.) et de durée.

Indépendants : personnes en emploi se déclarant « à leur compte » ou « salarié chef d’entreprise, gérant mandataire, PDG » (dans le cadre de leur emploi principal, lorsqu'elles en ont plusieurs), avant mise en cohérence avec la profession.

Indépendants économiquement dépendants : les indépendants ont décrit la nature de leur relation avec différentes entités, dans l’ordre : les clients, une entité amont (groupement, centrale d’achat ou coopérative, franchise, licence de marque, location-gérance, etc.), un intermédiaire pour accéder aux clients. Pour construire des catégories exclusives, la réponse relative à la dernière entité est privilégiée :

  • ceux qui disent avoir recours à un intermédiaire comme unique mode d'accès à leur clientèle sont désignés comme dépendants d’un intermédiaire ;
  • ceux qui ne sont pas dépendants d’un intermédiaire, mais qui ont une relation amont représentant au moins 75 % de leurs revenus et qui anticipent des difficultés importantes en cas de perte de cette relation sont dits dépendants d’une relation amont ;
  • ceux qui ne sont dépendants ni d’un intermédiaire ni d’une relation amont, mais dont le client principal représente au moins 75 % de leur revenu et qui anticipent des difficultés importantes en cas de perte de ce client sont appelés dépendants d’un client.

Durée habituelle hebdomadaire : durée travaillée une semaine sans événement exceptionnel, incluant les heures supplémentaires régulières.

Pour en savoir plus

Laïb N., « Les réseaux d’enseigne dans le commerce de détail alimentaire », Insee Première n° 1723, décembre 2018.

Eurostat, « Ouvrir dans un nouvel ongletLabour Force Survey (LFS) ad-hoc module 2017 on the self-employed persons, Assesment report - 2018 edition », Statistical reports, Eurostat, décembre 2018.

Eurostat, Ouvrir dans un nouvel ongletSelf-employment statistics, Statistics Explained, novembre 2018.

Richet D., Bignon N. et Mariotte H., «  Les créateurs d’entreprises : la frontière entre salariat et entreprenariat s’atténue », Insee Première n° 1701, juin 2018.

Babet D., « Moins de 200 000 indépendants déclarent accéder à leurs clients via une plateforme numérique », in Emploi, chômage, revenus du travail, coll. Insee Références, édition 2018.

Franceschi P., « Les réseaux dans les services », Insee Première n° 1678, décembre 2017.

Oostven A., Biletta I., Parent-Thirion A. et Vermeylen G., « Ouvrir dans un nouvel onglet Self-employed or not self-employed? Working conditions of economically dependent workers », Background paper, Eurofound, septembre 2013.